George Sand : la véritable histoire d'Aurore Dupin, de la femme blessée à la romancière adulée
Biographie courte de George Sand - George Sand, de son vrai nom Aurore Dupin, naît à Paris le 1er juillet 1804. Ayant perdu son père à l'âge de quatre ans, elle grandit à la campagne, auprès de sa grand-mère, à Nohant, pas loin de Châteauroux. Elle y étudie les sciences et le latin tout en menant une vie champêtre qui lui inspirera plusieurs de ses grandes œuvres.
Durant son adolescence, la jeune Aurore passe quelques années dans un couvent, puis se marie au baron François Casimir Dudevant en 1822.
Deux enfants, mais un mariage douloureux avec François Casimir Dudevant
La future George Sand rencontre Casimir Dudevant, avocat à la cour royale, lorsqu'elle habite à Meulun chez des amis de son père décédé, sa mère Victoire semblant peu encline à se charger de la jeune fille. En se mariant, elle devient la baronne Dudevant. Elle met au monde deux enfants, Maurice (1823) et Solange (1828). Mais le mariage se passe mal. Casimir Dudevant veut avant tout disposer comme il l'entend de sa femme et de sa fortune. Son penchant pour l'alcool, son comportement avec les domestiques et même le viol conjugal quand la future George Sand se refuse à lui sont évoqués par les biographes.
Assoiffée d'indépendance, la baronne finit par fuir et s'installe à Paris dès le début des années 1830. Des années plus tard, George Sand fera partie des rares femmes de l'époque à obtenir le divorce, qui n'existait pourtant pas en tant que tel à l'époque. Le 16 février 1836, le tribunal de La Châtre tranchera en faveur de l'épouse, se basant sur des "injures graves, sévices et mauvais traitements". Le combat continuera ensuite quelques années pour ses enfants et pour garder le contrôle des possessions de sa famille.
Son amant Jules Sandeau et ses premiers livres
Aurore Dupin fuit donc à Paris dès 1830 avec un de ses premiers amants, le romancier, Jules Sandeau. Elle a déjà eu auparavant des relations avec l'homme politique Aurélien de Seze ou l'intellectuel Stéphane Ajasson de Grandsagne, faisant naître d'ailleurs des doutes sur la paternité de Solange. Mais Jules Sandeau lui permet de débuter sa carrière d'écrivaine. Après s'être brièvement essayée au journalisme au "Figaro", un premier livre, Rose et Blanche, ou la Comédienne et la religieuse, paraît en 1831 sous le pseudonyme commun de Jules Sand.
Côtoyant les grandes plumes de l'époque, Aurore Dupin publie l'un de ses premiers véritables romans, Indiana, en mai 1832, sous le nom de George Sand, puis Valentine, la même année. Elle y défend ardemment le droit à la passion des femmes et s'oppose à toutes les oppressions dont elles sont victimes.
Très vite, les talents de la jeune écrivaine sont reconnus, notamment par Sainte-Beuve et Chateaubriand. Outre sa collaboration à la Revue des Deux Mondes, George Sand publie Lélia en 1833, œuvre lyrique où l'amour est malmené par les convenances et les préjugés de la société mondaine.
George Sand change de nom et s'habille comme un homme
Dès ses premières années à Paris, Aurore Dupin se fait appeler George Sand, un pseudonyme inspiré du nom de son amant, Jules Sandeau. La démarche est courante chez les femmes de lettre au XIXe siècle, les auteures féminines étant souvent dénigrées. Dans le même but, elle commence aussi à s'habiller en homme, pour contourner les barrières imposées aux femmes de l'époque, qui ne pouvaient pas accéder à de nombreux lieux culturels. Au début des années 1930, une permission de travestissement pour accompagner son mari à la chasse lui est même accordée.
George Sand, arrivée à Paris sans le sou, avec un mari gardant d'abord la main sur sa fortune, y trouve aussi un moyen de s'habiller à la mesure de ses maigres finances. Comme d'autres, elle va développer dans son habillement une nouvelle image de la féminité, avec une veste cintrée moulant son buste et ses hanches, devant un gilet blanc et une lavallière finement nouée, des pantalons conservant son allure filiforme et un haut-de-forme brillant. Une image de dandy au féminin parfaitement assortie avec celle des artistes et intellectuels qu'elle commence à fréquenter.
Des relations amoureuses avec Musset et Chopin
La fin de l'aventure de George Sand avec Jules Sandeau, en 1833, coïncide avec le début d'une série de relations amoureuses passionnées. La même année, elle fait la rencontre de la comédienne mondaine Marie Dorval, avec qui elle se lie d'amitié. Si leurs détracteurs auront lourdement pointé une relation lesbienne entre les deux femmes, celle-ci ne sera jamais prouvée.
Suivra une liaison amoureuse passionnelle avec Alfred de Musset qui durera jusqu'en 1835. Une histoire tumultueuse, faite de plusieurs ruptures et drames romantiques, notamment un voyage en Italie lors duquel le poète s'abandonne à tous les plaisirs pendant que George Sand, souffrante, doit rester alitée, ou la passion de Sand elle-même pour Pietro Pagello, médecin de Musset quand lui même sera atteint de fièvre délirante. Cette histoire inspirera entre autres à Musset ses Lettres d'un voyageur et à George Sand le roman Elle et lui en 1859.
La vie sentimentale de George Sand est aussi mouvementée que sa vie littéraire. Elle connaîtra en effet bien d'autre passions, parmi lesquelles figure Frédéric Chopin, rencontré par l'intermédiaire du compositeur Franz Liszt et de la femme de lettres Marie d'Agoult. Leur relation, entamée en 1836 lors un voyage difficile en Espagne (retracé dans Un hiver à Majorque en 1842), sera elle aussi marquée par de nombreux soubresauts sentimentaux, la maladie de Chopin, des projets de mariage de l'écrivaine (avec d'autres !), ou les relations houleuses de Chopin avec le fils de George Sand, Maurice. Plusieurs fois entrecoupée, elle s'achèvera en 1847.
Combat pour la République et socialisme
À la fin des années 1830, George Sand s'intéresse aux pensées socialistes et démocratiques, comme en témoigne le Compagnon du tour de France (1840) et Consuelo (1842). Particulièrement engagée, elle côtoie les grands démocrates de l'époque (Pierre Leroux, Armand Barbès ou encore Félicité de Lamennais), se lie d'amitié avec le député Louis Blanc, et se réjouit de la chute de Louis Philippe et des événements de février 1848.
L'échec de cette insurrection populaire la déçoit profondément. Aussi préfère-t-elle se retirer à Nohant et poursuivre sa série d'œuvres champêtres optimistes largement inspirée de son enfance. À la Mare au diable (1846) s'ajoutent ainsi François le Champi (1848), la Petite Fadette (1849) et les Maîtres sonneurs (1853).
Honoré de Balzac, Victor Hugo, Gustave Flaubert... Les Lettres de George Sand
George Sand participe activement à la vie intellectuelle de son époque et accueillera de nombreuses personnalités dans son domaine de Nohant, que Franz Liszt, Marie d'Agoult, Honoré de Balzac, Gustave Flaubert et Eugène Delacroix vont fréquenter. Ce dernier va d'ailleurs faire plusieurs portraits d'elle.
George Sand correspondra également avec Victor Hugo, entretenant une grande amitié avec l'écrivain, bien qu'ils ne se soient jamais rencontrés. De plus, les lettres qu'elle échange avec ses amants successifs viennent grossir encore l'œuvre littéraire monumentale de Sand. Sur la fin de sa vie, elle s'attachera particulièrement à Gustave Flaubert, dont elle prendra la défense par écrit dans la presse.
Alexandre Manceau et "Histoire de ma vie"
Après s'être consacrée quelques temps au théâtre, George Sand entreprend la rédaction de son autobiographie, Histoire de ma vie (1854-1855). L'œuvre est composée de cinq parties : "L'histoire d'une famille de Fontenoy à Marengo", "Mes premières années", "De l'enfance à la jeunesse", "Du mysticisme à l'indépendance", "Vie littéraire et intime".
George Sand y retrace ses souvenirs en prenant quelques libertés dans les retours en arrière et l'ordre chronologique. Elle vit une dernière liaison amoureuse avec un certain Alexandre Manceau, d'origine ouvrière, et qui lui fait aussi office de secrétaire. Il est le dernier de ses amants et lui offre un cadre apaisé qui lui permet d'écrire jusqu'à son dernier souffle. George Sand s'éteint le 8 juin 1876, à Nohant, à l'âge de 72 ans, laissant derrière elle une œuvre considérable et variée qui l'inscrit dans la lignée des plus grands auteurs français du XIXe siècle.
George Sand : dates clés
- 1 juillet 1804 : Naissance d’Aurore Dupin
- Aurore Dupin, future George Sand, naît à Paris. Orpheline de père dès l’âge de quatre ans, elle sera élevée par sa grand-mère paternelle dans le domaine de Nohant (Indre), appartenant aux Dupin depuis la révolution. La jeune fille passera ainsi toute son enfance à la campagne.
- 1822 : Mariage avec Casimir Dudevant
- La jeune Aurore Dupin se marie avec le baron Casimir Dudevant, avec lequel elle aura deux enfants. Mais la relation entre les deux époux se détériore rapidement. Aussi, tous deux se séparent. En quête d’indépendance, la baronne se rend à Paris. Elle s’essaiera alors au journalisme au "Figaro".
- Mai 1832 : George Sand publie "Indiana"
- Aurore Dudevant publie son premier roman sous le pseudonyme de George Sand. Elle y met en scène une jeune créole qui tente de se libérer de son mariage pour vivre ses passions. La même année, George Sand publiera "Valentine", un roman qui s’inscrit dans la lignée sentimentale et féministe de l’auteur. Ce dernier ouvrage lui vaudra l’admiration de Chateaubriand.
- Juillet 1833 : George Sand s’éprend d’Alfred de Musset
- George Sand et Musset commencent leur tumultueuse histoire d’amour. Tous deux partiront dès le mois de décembre à Venise, mais Alfred Musset profitera de la fièvre et de la dysenterie de la jeune écrivaine pour s'abandonner à tous les plaisirs de la vie nocturne. Plus tard, George Sand s’éprendra de Pagello, le médecin de son amant, atteint de fièvre à son tour. La relation entre les deux écrivains s’achèvera définitivement en 1835.
- Février 1839 : Chopin et Sand rentrent de Majorque
- Après avoir passé un hiver dans des conditions matérielles déplorables en compagnie de George Sand, Frédéric Chopin rentre malade de Majorque. Il a pourtant profité de ce séjour pour terminer ses 24 préludes. Le mauvais temps qui les accompagna une partie de l’hiver est à l’origine d’une supposée évocation de gouttes de pluies au sein de ces préludes. Toutefois, Chopin a toujours rejeté la musique imitative et il existe presque autant de préludes que d’interprétations sur la présence de cette goutte d’eau. Ces œuvres gardent toutefois une résonance particulière et c’est le prélude n°4 qui accompagnera les funérailles de Chopin.
- 1846 : Publication de "la Mare au diable"
- George Sand, de retour dans le domaine de Nohant, publie un roman champêtre intitulé "la Mare au diable". Outre l’histoire d’amour entre Germain, paysan veuf avec trois enfants et Marie, George Sand souhaite rendre hommage à la campagne berrichonne où elle a grandi. Elle y dépeint une société idéale, loin des perversions de la ville et souhaite redorer l’image de la vie paysanne.
- 1849 : George Sand publie "la Petite Fadette"
- Dans la lignée des romans champêtres, George Sand publie "la Petite Fadette", une œuvre qui met en scène deux jumeaux épris de la même fille, laide et mal vêtue mais aux nombreuses qualités. Les scènes se déroulent dans la campagne berrichonne, où les paysans font preuve des plus grandes valeurs morales.
- 1873 : George Sand refuse la Légion d'honneur
- George Sand répond alors avec humour au ministre Jules Simon qui lui propose la décoration : "Ne faites pas cela, cher ami ; non, ne faites pas cela, je vous en prie ! Vous me rendriez ridicule. Vrai, me voyez-vous avec un ruban rouge sur l'estomac ? J'aurais l'air d'une vieille cantinière !"
- 8 juin 1876 : Mort de George Sand
- Après avoir passé une grande partie de sa vie la plume à la main, George Sand s’éteint à Nohant, à l’âge de 72 ans, d'une occlusion intestinale.