Emprunter quand on se sait gravement malade
Depuis la mise en place de la convention AREAS en janvier 2007, l'impossibilité d'accorder une assurance emprunteur ne constitue plus une raison valable pour rejeter une demande de prêt émanant de personnes handicapées ou ayant une santé extrêmement fragile. Eclairage.
Toute personne présentant un handicap, ou une maladie grave, a le droit de vivre et consommer comme une personne en "bonne forme". Et cela est encore plus vrai lorsque la maladie relève du passé. Tel est le message de la loi appliquée depuis le 6 janvier 2007, appelée également convention pour "s'assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé" (Areas). Son succès est fulgurant : "En 2007, 400 000 demandes présentant un risque aggravé de santé ont été comptabilisées, note la Fédération française des sociétés d'assurances. Elles portaient sur des garanties en cas de décès et de perte totale et irréversible d'autonomie, ainsi que sur la garantie invalidité pour 68 % d'entre-elles. Dans 92 % des cas, les assureurs ont proposé une couverture, au moins pour le risque de décès." Un bémol toutefois : sur 7 200 demandes relevant de risques très aggravés, un peu moins 1 500 ont reçu une proposition d'assurance. Soit tout juste une demande sur cinq.
Acheter une maison, une voiture...
Reste qu'il y a dans ce dispositif une réelle avancée. Une personne handicapée, malade, ou anciennement malade, peut aujourd'hui acheter un logement pour un montant maximum de 300 000 euros ou financer l'acquisition d'une automobile jusqu'à 15 000 euros grâce à un emprunt. Ce qui n'était pas possible avant 2007. Les découverts et les crédits revolving ne sont toutefois pas concernés. La fin de cette discrimination à l'accès au crédit repose sur des règles bien précises, notamment la possibilité d'ajouter une surprime sur les taux de crédits immobiliers qui ne peuvent dépasser de plus de 1,5 point le taux effectif global proposé dans un cas "normal".
Comme pour tout crédit, la personne dite à risque aggravé -c'est-à-dire ayant une probabilité plus forte par rapport au reste de la population de se retrouver invalide ou de décéder- se doit d'être solvable. Si les échéances du crédit paraissent difficilement remboursables faute de revenus suffisants, ou parce que la part de d'endettement est trop élevée, l'établissement financier conserve le droit de refuser le financement. En revanche, l'impossibilité d'accorder une assurance emprunteur ne constitue plus une raison valable pour un rejet.
Les sources de refus très limitées et encadrées
D'abord, si l'emprunteur à risque présente une assurance individuelle qui offre des garanties équivalentes à celles de l'assurance emprunteur associée au contrat de prêt, l'établissement de crédit ne peut refuser l'octroi de l'emprunt. Idem si une proposition d'assurance a été acceptée dans le cadre d'un autre projet de financement. Trois conditions doivent alors être réunies : les sommes demandées et la période d'emprunt ne peuvent pas être supérieures au précédent projet ; la proposition doit avoir moins de quatre mois au moment du montage du dossier de crédit.
Ensuite, si l'emprunteur propose des garanties alternatives à l'assurance emprunteur, comme une caution, une hypothèque, un placement financier sécurisé..., là aussi, l'établissement de crédit se doit de donner une suite favorable à la demande de financement. La convention prévoit même qu'il ait un rôle très actif pour trouver une solution de ce type afin de palier l'absence d'une assurance emprunteur.
Enfin, la demande de prêt et son éventuel refus doivent être notifiés dans les cinq semaines suivant leur dépôt auprès de l'établissement de crédit. Plus précisément, la réponse de l'assureur du crédit doit intervenir dans les trois semaines, et celle de l'établissement de crédit dans les deux semaines suivant l'avis de l'assureur. Le courrier indiquant la décision de l'établissement devra préciser les coordonnées postales du médecin de l'assureur pour permettre au demandeur de connaître les motifs du rejet d'assurer le prêt.
Saisie d'un médiateur en cas de contestation du motif de refus
Sur la base de ce refus, le demandeur d'emprunt peut saisir la commission de médiation afin d'obtenir un règlement amiable. En marge de cette commission, il existe deux autres organismes qui veillent au bon usage de la convention. D'un côté, il y a la commission de suivi et de propositions. Elle veille à la bonne application du dispositif et peut, si besoin est, formuler des recommandations pour faciliter l'accès au crédit pour les personnes malades ou handicapées. De l'autre, une commission des études et de recherche organise un suivi statistique sur le niveau de mortalité pour les principales pathologies. Ce qui permet de nuancer le degré de risque dit aggravé établi de facto par les assureurs.
Il faut noter que la convention Areas a mis en place également un dispositif de confidentialité. Ainsi, l'emprunteur est certain que le conseiller clientèle, à qui il remet sa demande de crédit, n'aura pas accès aux informations relavant de sa maladie ou de son handicap.