Autoroute A69 : que vont devenir les travaux après l'appel de l'Etat de la suspension du chantier ?

Autoroute A69 : que vont devenir les travaux après l'appel de l'Etat de la suspension du chantier ? Le tribunal administratif de Toulouse s'est prononcé contre le projet d'autoroute entre la ville rose et Castres. Le chantier va devoir s'arrêter, mais "l'État fera appel" annonce ce vendredi la ministre de la Transition écologique.

Le tribunal administratif de Toulouse a décidé jeudi 27 février 2025 d'annuler l'autorisation environnementale du chantier de l'A69. La justice a estimé que l'autoroute en construction entre Toulouse (Haute-Garonne) et Castres (Tarn) ne répondait à aucune "raison impérative d'intérêt public majeur" justifiant de porter atteinte à l'environnement. L'arrêt préfectoral autorisant le chantier est donc annulé. Les travaux, eux, vont devoir s'arrêter. Une décision "ubuesque : un chantier avancé aux deux tiers est arrêté du jour au lendemain", déplore le ministre des Transports, Philippe Tabarot, dans un communiqué.

Justement, l'Etat a annoncé faire appel en demandant un sursis à exécution de la décision du tribunal administratif, par la voix du ministre des Transports. Une décision soutenue par la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher. "Je rappelle que ce projet est soutenu par tous les élus locaux, quel que soit leur bord, des élus de droite, des élus de gauche, des élus qui ont à cœur de protéger l'environnement", affirme Agnès Pannier. Elle appelle également à "écouter les habitants sur le terrain" et à "ne pas regarder les dossiers avec des yeux de Parisiens", ce vendredi 28 février sur France Info.

C'est la première fois en France qu'une infrastructure routière d'une telle importance est interrompue par un jugement, et non par une décision politique. Et cette décision devrait avoir de lourdes conséquences sur certains acteurs locaux. Le président du Conseil départemental du Tarn Christophe Ramond s'est dit "atterré par cette situation ubuesque !". "Plus de 300 millions d'euros ont été investis, 70 % des ouvrages d'art sont réalisés, la fin des travaux est prévue en fin d'année, et la justice sonne maintenant l'arrêt du chantier… Quel sens du timing ! On marche sur la tête", peste-t-il dans les colonnes de La Dépêche du Midi.

L'arrêt du chantier pourrait donc coûter très cher, entre le remboursement des frais engagés, le démantèlement, le reboisement, la surveillance des matériels entreposés ainsi que la sécurisation du chantier peut-être par l'intermédiaire de clôtures : la facture pourrait atteindre un milliard d'euros selon les informations de BFMTV/RMC, et entre 500 millions et un milliard d'euros pour Le Figaro.

Atosca - le constructeur et futur exploitant de l'A69 - dit prendre "acte de l'impossibilité de poursuivre les travaux" et de l'intention de l'Etat d'engager "toutes les voies de recours permettant la reprise du projet dans les meilleurs délais possibles et dans le respect de la réglementation". En cas d'arrêt définitif du chantier, l'Etat pourrait également devoir indemniser Atosca voire organiser une remise en état du tronçon ou un nouveau processus de consultation. L'an dernier, la société rappelait qu'au pic de son activité, jusqu'à 1 200 personnes travaillaient sur le chantier.

De nombreux emplois en péril

La fin des travaux conduirait "une grande majorité de ces personnels à la merci d'un licenciement économique et donc au chômage faute d'être en mesure de les réaffecter sur d'autres chantiers dans la région ou en France", confiait la société dans les colonnes du Figaro. "Nos équipes de construction, les entreprises locales et les sous-traitants sont engagés depuis bientôt deux ans pour construire une infrastructure attendue et soutenue depuis des décennies. Nous avons répondu à une commande de l'État après qu'il a retenu notre proposition", regrette le directeur général d'Atosca, Martial Gerlinger.

"Arrêter le chantier aujourd'hui serait une folie écologique et sociale et coûterait près d'un milliard d'euros aux contribuables", a déclaré le député du Tarn Jean Terlier. "Cette autoroute est vitale pour notre territoire, et son désenclavement, et je continuerai à me battre pour sa réalisation", a-t-il lancé ce jeudi, des propos relayés par La Dépêche du Midi. Dans les faits, l'économie locale a de grandes chances de pâtir de cette situation.

Comme le rappelle le quotidien Le Figaro, le capital d'Atoca se partage entre plusieurs sociétés qui risquent, toutes, de perdre leur investissement en cas d'annulation définitive du projet. Le groupe Pierre Fabre - fleuron de l'économie tarnaise et régionale - déploie par exemple un bâtiment de 10 000 m2 à Castres pour 600 collaborateurs. La suspension "mènerait le groupe à modifier sa stratégie concernant l'implantation et le développement de ses sites du Tarn" confie auprès du journal le patron du groupe.

Un projet alternatif défendu par les écologistes

Pour rappel, des platanes centenaires ont été abattus et des terres agricoles sacrifiées dans le cas de l'A69. Pour rien ? Certains militants écologistes proposent déjà un projet alternatif de "véloroute", une portion dédiée aux deux-roues de 87 kilomètres entre Toulouse et Mazamet entourée d'espaces agricoles et d'arbres qui permettrait de ne pas détruire tout ce qui a déjà été construit. Ce projet baptisé "Une autre voie" avait d'ailleurs été présenté en septembre 2023 à l'Assemblée nationale devant une poignée de parlementaires.

La députée européenne écologiste Marie Toussaint se félicite de la décision du tribunal administratif de Toulouse et remercie "celles et ceux qui ont lutté sans céder au découragement, sous les mensonges, les insultes et les attaques". Selon elle, c'est "une victoire contre un projet aussi inutile que dévastateur".

Remboursement, surveillance... Une facture d'un milliard d'euros ?

En effet, alors que les travaux ont débuté en 2023, le chantier est bien avancé, environ aux deux tiers. Des ponts, des ronds-points sont déjà sortis de terre tout comme des échangeurs et les travaux de terrassement ont bien avancé. Seul le revêtement n'a pas encore été versé. Dans le détail, 200 ouvrages sont terminés et 50 % du terrassement sur les 53 km d'autoroute.

Dernières mises à jour

16:08 - Marine Tondelier (EELV) salue un "jour historique"

"C'est un jour historique : pour la première fois, la justice française interrompt un projet autoroutier pour des raisons environnementales. Le tribunal administratif de Toulouse vient de faire sauter un verrou, et nous espérons que sa décision sur l'A69 fera jurisprudence", se félicite la secrétaire nationale des Ecologistes Marine Tondelier après la suspension du chantier de l'autoroute A69 entre Toulouse et Castres.

14:24 - La fédération nationale des travaux publics fustige le verdict du tribunal

La fédération nationale des travaux publics "s’indigne de la décision du tribunal administratif de Toulouse, qui donne raison à une poignée de militants radicaux contre l’avis de l’Etat et de l’ensemble des collectivités concernées" après l'annulation par la justice de l'autorisation environnementale de l'A69. "Cette décision vient aujourd’hui mettre en péril l’avenir de l’ensemble des projets d’infrastructures en France" lance son président Alain Grizaud dans les colonnes du quotidien La Dépêche du Midi.

14:11 - Déçue mais pas abattue, Carole Delga prône le "désenclavement"

La présidente de la région Occitanie Carole Delga s'est également exprimée après la décision du tribunal administratif de Toulouse de faire stopper les travaux de l'A69. Elle affirme poursuivre sa lutte en faveur du chantier et "continuera d’être aux côtés des habitants et des entreprises du sud du Tarn qui ont besoin de cette liaison rapide, qui la soutiennent très largement car elle est nécessaire au désenclavement du bassin de Castres-Mazamet", confie-t-elle à nos confrères de La Dépêche du Midi.

14:02 - Une décision "irresponsable" et "dangereuse" pointe le maire de Toulouse

"C’est une décision de jurisprudence, donc qui crée une référence juridique totalement nouvelle, dont la conséquence est de mettre désormais en danger tous les projets significatifs en France. À l’heure où notre pays doit se réindustrialiser", regrette le maire de Toulouse Jean-Luc Moudenc, dans les colonnes d'Actu Toulouse après l'annulation de l'autorisation environnementale du chantier de l'A69 par le tribunal administratif de la ville rose. "En choisissant délibérément d’ignorer les éléments de contexte, l’aspect irresponsable (au sens juridique comme moral de cet adjectif) de cette décision crée désormais une très dangereuse insécurité juridique, de portée générale, aux conséquences incalculables, car sans limite", prévient-il.

12:54 - Agnès Pannier-Runacher ne "veut pas opposer écologie et activité humaine"

"L'écologie, ce n'est pas des interdictions tout azimut. C'est précisément ce qui fait qu'aujourd'hui les Français se détournent de l'écologie alors même que nous avons besoin de défendre l'environnement", a lancé sur France Info la ministre de la Transition écologique ce vendredi, Agnès Pannier-Runacher. "Je ne veux pas opposer écologie et activité humaine. L'écologie c'est un équilibre entre l'homme et son environnement", assure-t-elle, au sujet de l'appel de l'Etat de la décision de l'arrêt des travaux sur l'autoroute A69 devant relier Toulouse à Castres. Le projet a été conçu "avec rigueur" et avec des "mesures considérables" pour "compenser l'impact environnemental", précise la ministre.

12:49 - "L'État fera appel", confirme la ministre de la Transition écologique

Jeudi, le tribunal administratif de Toulouse a décidé d'annuler l'arrêt autorisant le chantier de l'autoroute A69 entre Toulouse et Castres. Une décision que l'Etat conteste, ce dernier va faire appel. "L'État fera appel et je soutiens évidemment cet appel", assume la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher ce vendredi matin sur France info. "Nous chercherons à défendre l'idée que ce projet est un projet d'importance majeure", et participe au "désenclavement" du sud du Tarn, "très important pour les habitants de ce territoire". "Je rappelle que ce projet est soutenu par tous les élus locaux, quel que soit leur bord, des élus de droite, des élus de gauche, des élus qui ont à cœur de protéger l'environnement", poursuit-elle.