Ces panneaux retournés se multiplient à l'entrée des communes de France, voici la signification si vous en croisez-un
Depuis mi-novembre, un phénomène inhabituel frappe de nombreuses villes et autant de villages français : des panneaux de signalisation à l'entrée et à la sortie des communes se retrouvent mystérieusement à l'envers. Les panneaux sont généralement retournés la nuit, quand les riverains sont en train de dormir, pour ne pas être vu mais aussi pour minimiser les désagréments pour les citoyens.
Pour les automobilistes, le résultat est au mieux étonnant, au pire déroutant. Et pourtant cette mode des panneaux retournés a rencontré un écho favorable chez certains maires. Sur les réseaux sociaux, le hashtag #onmarchesurlatête, qui accompagne cette drôle de manœuvre, a également pris de l'ampleur.
Cette action observée dans divers départements est en fait l'œuvre des Jeunes Agriculteurs (JA) et de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), qui cherchent à alerter le public et les pouvoirs publics sur les difficultés rencontrées par le secteur agricole. La campagne vise à souligner l'incohérence et la déconnexion des politiques agricoles avec la réalité du terrain.
Avec le slogan "On marche sur la tête", les agriculteurs expriment leur frustration face à "toujours plus de normes, de restrictions et d'interdictions" qui, selon eux, pénalisent l'agriculture française. Ils critiquent l'empilement des règles, malgré les nombreux plans lancés par le gouvernement pour soutenir le secteur. Ces mesures, incluant le plan bio, le plan protéines, ou encore le plan viticulture, n'ont pas réussi à alléger la charge réglementaire pesant sur les eux.
Les agriculteurs pointent du doigt plusieurs problèmes majeurs. Parmi eux, l'augmentation des taxes sur les produits phytosanitaires (engrais et pesticides), les coûts de production élevés des céréales françaises par rapport à ceux des pays voisins, et les réponses insuffisantes face aux changements climatiques. L'inquiétude est également grande quant à l'avenir de la souveraineté alimentaire française, avec une production en baisse et des importations croissantes.
Des enjeux locaux sont aussi mis en avant. Par exemple, les inondations récentes dans le Pas-de-Calais et la Somme, ou les difficultés spécifiques rencontrées dans le vignoble bordelais. Dans le Nord, la question des jachères imposées par l'Union européenne dès 2024 est une préoccupation majeure, impactant directement le rendement agricole de la région.
Les Jeunes Agriculteurs de Savoie (JA 73), en particulier, demandent un renforcement des contrôles sur les étiquetages en magasin, soulignant la concurrence déloyale avec des produits venus de l'étranger qui ne sont pas soumis aux mêmes normes.
Si cette opération de panneaux retournés est largement symbolique, elle n'est pas sans susciter des réactions contrastées. Certains, comme le maire de Saint-Molf, la jugent "puérile et stupide", soulignant le coût de la remise en état pour les communes. Cependant, les agriculteurs restent déterminés à se faire entendre, organisant d'autres formes de manifestations, comme des rassemblements de tracteurs ou des dépôts de fumier près des préfectures.