Comment faire grève ? A quelles conditions ? Et dans le privé ?

Comment faire grève ? A quelles conditions ? Et dans le privé ? Tous les syndicats français ont lancé un appel national à la grève contre la réforme des retraites pour le 19 janvier. Quelles sont les conditions à respecter pour pouvoir faire grève et être protégé par la loi ?

Face à la réforme des retraites, les huit syndicats français ont appelé à une grève nationale le jeudi 19 janvier. Tous les travailleurs, salariés ou indépendants, issus du secteur public ou privé sont invités à prendre part au mouvement social et les syndicats ont pris toutes les dispositions nécessaires pour permettre la plus grande mobilisation possible. Si certains travailleurs syndiqués sont au fait de la procédure à suivre pour exercer le droit de grève dans les règles de l'art, d'autres salariés tâtonnent encore.

Qui peut faire grève ?

Le droit de grève est garanti par la Constitution de 1958, mais il est encadré. En tant que droit individuel, le droit de grève peut être exercé par chaque travailleur mais uniquement au sein d'un collectif. Cette précision tient dans la définition du droit de grève qui est l'arrêt collectif du travail organisé de manière concertée et afin de défendre des revendications professionnelles.

Tous les salariés d'une entreprise peuvent donc faire grève dès lors qu'ils sont plusieurs (minimum 2) à porter le mouvement. Si un salarié est seul à vouloir faire grève au sein d'une entreprise, il peut se mettre en grève uniquement si un appel national à la mobilisation a été lancé, ce qui est le cas pour la contestation à la réforme des retraites.

Si tous les salariés et tous les agents du public sont en mesure de faire grève, certaines professions font figure d'exceptions et sont privées du droit de grève, c'est notamment le cas des forces de l'ordre (les policiers, les CRS, les militaires, les personnels de l'administration pénitentiaire), des personnels des transmissions du ministère de l'Intérieur, des magistrats de l'ordre judiciaire et de certains personnels de la navigation aérienne.

Comment faire grève dans le secteur public ?

Le secteur public n'échappe pas au droit de grève, mais il pose plusieurs conditions à l'exercice de ce droit, notamment le dépôt d'un préavis de grève par une ou plusieurs organisations syndicales au moins cinq jours avant la mobilisation. Ce préavis n'est demandé que dans les services de la fonction publique et dans quelques entreprises privées qui sont chargées d'assurer des missions de service public et des secteurs définis comme les transports. La SNCF et la RATP sont par exemple concernées par le dépôt de préavis avant le déclenchement d'une grève.

Ce préavis précise les modalités de la grève et encadre le mouvement avec des horaires de début et de fin de mobilisation ou confère à la grève un caractère "illimité". Le document peut aussi préciser les raisons de la grève, à savoir les revendications des salariés grévistes qui doivent obligatoirement être connues de l'employeur.

En plus du dépôt de préavis, les salariés de secteur public ou des entreprises privées chargées de missions de service public doivent se déclarer en grève. Les professeurs dans les établissements scolaires du premier degré sont soumis à cette obligation.

Comment faire grève dans les entreprises privées ?

Le droit de grève s'exerce théoriquement plus facilement dans le secteur privé et pour cause les conditions à respecter avant de déclencher un mouvement de grève sont moins nombreuses. Il n'y a pas de préavis à respecter et les salariés qui souhaitent faire grève ne sont pas tenus de signaler à leur employeur leur volonté de rejoindre le mouvement social. Pour qu'une grève puisse être déclenchée dans le privé, il suffit que l'employeur soit au courant des revendications professionnelles défendues par les salariés. Bien sûr, il faut aussi que le mouvement soit une initiative collective, sans pour autant devoir être majoritaire au sein de l'entreprise.

Comment prévenir son employer avant une grève ?

Encore une fois, seule quelques professionnels sont tenus de se déclarer individuellement avant de participer à une grève. Il s'agit surtout des enseignants du premier degré, du personnel de crèche, des agents hospitaliers et de quelques autres qui peuvent prévenir leur employeur par écrit (mail, courrier) ou à l'oral. Autrement, il n'est jamais nécessaire d'adresser une liste précise des grévistes à l'employeur. Ce qui est obligatoire, en revanche, c'est de mettre au courant l'employeur des revendications professionnelles qui motivent la grève avant le déclenchement du mouvement.

Il convient généralement d'adresser un courrier, signé par le collectif en grève (au moins deux personnes) ou par un des syndicats de l'entreprise, à la direction pour lister toutes les revendications liés au mouvement, à noter que celles-ci doivent être professionnelles et ne peuvent être uniquement politiques. L'avocate en droit du travail Elena Konopnicki a précisé auprès d'actu.fr : "Souvent, on fait parvenir les revendications le matin même de la grève. La veille, c'est possible, si on veut prévenir à l'avance l'employeur".

Combien de temps une grève peut-elle durer ?

Il n'y a pas de délai minimal ou maximal à l'exercice du droit de grève. Les salariés grévistes peuvent donc arrêter le travail sur une courte durée (quelques minutes, une heure, une demi-journée), sur des jours complets, et même sur des périodes plus longues. Non seulement de ne pas être limitées dans le temps, les grèves peuvent aussi être répétées.

Quelles conséquences sur les salaires ?

Les grèves peuvent s'organiser librement par les salariés, à quelques conditions près, mais elles ont aussi un coût pour les grévistes. Les grèves suspendent le contrat de travail et donc le temps passé à défendre des revendications lors d'un mouvement social n'est pas rémunéré. Les employeurs procèdent donc à des retenues sur salaires. Cette retenue doit obligatoirement être proportionnelle à la durée de l'arrêt de travail.

Dans le public, la règle change légèrement puisque pour les fonctionnaires de l'Etat, chaque jour de grève et donc non travaillé revient à la rétention d'1/30ème du traitement mensuel et ceci que l'arrêt de travail court sur la journée complète ou sur quelques heures uniquement. En ce qui concerne les agents territoriaux ou hospitaliers la retenue sur salaire est d'1/30ème par journée non travaillée, 1/60ème par demi-journée de grève et 1/151,67ème par heure d'absence précise l'union nationale des syndicats autonomes (Unsa).