Vite mon prénom : une liste de prénoms français dans la loi ?

Vite mon prénom : une liste de prénoms français dans la loi ? PRENOM 2022. Eric Zemmour milite pour réinstaurer la loi de 1803 encadrant les prénoms donnés aux enfants. Depuis le 15 septembre 2021, le site "Vite mon prénom" permet de savoir si son prénom entre dans ce cadre. Sur des bases solides ?

[Mis à jour le 21 septembre 2021 à 17h29] Et s'il faisait tester ses idées par des coups de communication déguisés ? Après une nouvelle sortie virulente d'Eric Zemmour sur les prénoms donnés aux enfants, un site a été mis en ligne sur Internet le 15 septembre 2021 : "Vite mon prénom". Il permet de tester si son prénom entre dans le cadre de la loi de 1803 qui régentait les prénoms donnés aux enfants (lire plus bas) et que le polémiste souhaite réinstaurer. La mesure pourrait-elle séduire dans l'électorat français alors qu'Eric Zemmour, qui ne n'est pas déclaré candidat, est crédité de 11% d'intentions de vote au premier tour de l'élection présidentielle selon un dernier sondage Harris Interactive pour Challenges paru mardi 21 septembre ? A cette même date, 80 millions de tests avaient été effectués sur le site.

Mais qui est à l'origine de "Vite mon prénom" ? La proposition d'Eric Zemmour a-t-elle été détournée par des opposants à l'ancien journaliste ou l'initiative revient-elle à des soutiens du polémiste ? Il est à noter que le nom du candidat qui concentrerait une partie de l'électoral de Marine Le Pen au premier tour de la présidentielle n'apparait nulle part sur le site. Il est seulement fait mention de la loi de 1803 et d'une redirection vers les services de l'état-civil. Impossible de trouver la trace du créateur du site.

"Vite mon prénom" est en effet hébergé en Islande, comme l'a relevé Le Parisien, par une société où la discrétion sur les clients est de rigueur. On en sait plus en revanche sur la manière dont le site est parvenu sur les écrans de nombreux internautes. Au départ, il a été mis en avant dans un simple tweet, posté par un compte anonyme : "Le Polémiste", auréolé d'un drapeau français et sur lequel de nombreux posts font référence à Eric Zemmour. Puis un topic a été ouvert sur le forum du site Jeuxvideos.com par un utilisateur, banni quelques instants plus tard. Suffisant toutefois pour lancer l'effet boule de neige. 

L'analyse, par quelques experts, du code qui a permis de façonner "Vite mon prénom" n'a pas permis d'en apprendre davantage, même si le Huffington Post croit savoir que des références à l'extrême-droite avaient été glissées avant d'être supprimées. Alors, détournement ou opération de communication ?

Les prénoms, obsession d'Eric Zemmour

Si l'origine de "Vite mon prénom" devrait rester anonyme, il n'en demeure pas moins que ce site offre une visibilité inédite à Eric Zemmour et à l'un de ses thèmes favoris : les prénoms. Alors qu'il entretient toujours le flou autour d'une éventuelle candidature à l'élection présidentielle en 2022, le polémiste s'est à nouveau prononcé ces dernières semaines contre les prénoms étrangers et veut contraindre les parents à donner des prénoms français. "Je pense que la défrancisation est un des problèmes majeurs" a-t-il encore déploré sur RTL mardi 14 septembre 2021. Le chroniqueur, qui s'est mis en retrait de CNews, souhaite ainsi rétablir la loi du 1er avril 1803 sur les prénoms, instaurée par Napoléon Bonaparte. 

Ce n'est pas la première fois qu'Eric Zemmour évoque la thématique des prénoms. En 2018, ce sujet avait valu à l'ancien journaliste de se retrouver devant le tribunal. Invité des Terriens du dimanche, présenté par Thierry Ardisson sur C8, il avait fait face à Hapsatou Sy, une entrepreneuse devenue chroniqueuse chez Cyril Hanouna. Sur le plateau, l'auteur de La France n'a pas dit son dernier mot, paru mercredi 15 septembre, lui avait lancé : "Normalement, chez moi, on doit donner des prénoms dans ce qu'on appelle le calendrier, c'est-à-dire des saints chrétiens. […] Corinne, ça vous irait très bien." A la suite de la diffusion de la séquence, le polémiste a été renvoyé en correctionnelle pour "injure raciste" et attend d'être jugé. Mais il persiste et signe sur ce sujet. Pourtant, ironie de l'histoire, Corinne n'est pas inscrite en tant que telle dans le calendrier et n'est pas une sainte. Elle est honorée le 18 mai, le jour de la Saint Éric...

Qu'est-ce que la loi du 1er avril 1803 sur les prénoms ? 

Jusqu'en 1803, les prénoms sont donnés librement, sans réglementation particulière. A son arrivée au pouvoir, Napoleon Bonaparte veut régenter le sujet et fait voter la "Loi relative aux prénoms et changements de Noms du 11 Germinal", soit la loi du 1er avril 1803. L'article 1er ordonne : "A compter de la publication de la présente loi, les noms en usage dans les différents calendriers, et ceux des personnages connus de l'histoire ancienne, pourront seuls être reçus comme prénoms sur les registres de l'état civil destinés à constater la naissance des enfants ; et il est interdit aux officiels publics d'en admettre aucun autre dans leurs actes." Il n'est donc nulle mention d'emprunter les prénoms exclusivement au calendrier "des saints-chrétiens". L'état-civil pouvait toutefois refuser tout prénom qui ne s'inscrivait pas dans le cadre de la loi.

Un siècle et demi plus tard, la loi est assouplie par une circulaire du 12 avril 1966 autorisant les prénoms régionaux, composés, issus de diminutifs ou de la mythologie. Puis le 8 janvier 1993, la loi abroge officiellement le texte de Napoléon Bonaparte - bien qu'il ne fut jamais réellement appliqué - et laisse libre cours aux parents de choisir le prénom de leur enfant, tant qu'il ne porte pas préjudice à ce dernier.

Que propose Eric Zemmour concrètement pour les prénoms en 2022 ? 

Sur RTL, Eric Zemmour a expliqué regretter l'abrogation de la loi de 1803 : "C'est une loi qui a parfaitement fonctionné pendant un siècle et demi, qui a assimilé d'abord tous les gens qui venaient des régions qui étaient fort éloignées et qui parlaient mal le français." Ainsi, le possible candidat à la présidentielle milite pour sa réintroduction dans les textes car, selon ses dires, "la défrancisation est un des problèmes majeurs". Et de lancer : "Il faut refaire des Français !"

Ainsi, le sexagénaire veut "interdire les prénoms étrangers, pas seulement musulmans", avant de développer sa pensée : "Ce qui me gêne, c'est qu'au bout de trois générations, on appelle encore ses enfants Mohamed. Pour les gens qui s'appellent Mohamed, c'est une catastrophe car c'est un objet de discrimination. Mais je pense aussi que ça a été une erreur d'autoriser les Kévin et les Jordan." 

Vite mon prénom : un site sur la proposition d'Eric Zemmour

Exit Manolo, Mattéo ou même Élise, Mohamed et Johnny, bienvenue Pierre, Marie, Louise et Jacques. Quel sera votre prénom si Eric Zemmour se présentait à l'élection présidentielle et rétablissait la loi de 1803 ? C'est en ce sens que le site (parodique ou sérieux ?) "Vite mon prénom" a vu le jour, mercredi 15 septembre, en référence détournée à "Vite Ma Dose", l'outil qui permet de trouver le plus rapide rendez-vous de vaccination contre le Covid-19. 

Ainsi, sur "Vite mon prénom", il est possible de tester son prénom pour découvrir s'il correspond à la loi de 1803. Et si le prénom ne correspond pas, un nouveau est proposé en remplacement, juste au-dessus d'un lien qui permet d'accéder directement sur le site de changement de prénom de l'état-civil. Plus de 80 millions de tests avaient déjà été effectués mardi en fin de journée.