L214 : une nouvelle vidéo, des cochons maltraités dans le Finistère

L214 : une nouvelle vidéo, des cochons maltraités dans le Finistère L'association L214 lance une nouvelle alerte sur les conditions de vie (et de mort) d'animaux. Cette fois-ci, les militants ont filmé des images chocs d'un élevage de cochons dans le Finistère.

[Mis à jour le 21 novembre à 17h33] L214 affirme avoir porté plainte auprès du procureur de la République de Brest "pour mauvais traitement et sévices graves envers des animaux", contre un élevage intensif situé dans le Finistère, et appartenant au groupe Triskalia. L'association reproche à l'élevage les conditions de traitement effroyables de leurs 800 truies reproductrices et 8000 cochons engraissés à instant T. Connue pour ses images chocs filmées dans les structures incriminées, L214 a publié une nouvelle vidéo, avec la participation de Yann Arthus-Bertrand. Le photographe engagé dans la cause écologique, s'exprime dans la vidéo sur la nécessité d'informer le grand public sur de telles pratiques : "Sans lanceur d'alerte, les images qui vont suivre de ces pauvres cochons, enfermés toute leur vie dans un élevage intensif, vous ne les verriez jamais. C'est pourtant la triste réalité, et il faut bien l'admettre, le sort que nous réservons à ces animaux, c'est tout simplement l'enfer sur Terre."

Sur ces images, on peut voir des cadavres de cochons en putréfaction plus ou moins avancée, au milieu des cochons vivants, mais aussi des porcelets tout juste nés dont les pattes se coincent dans les grilles du sol ou encore morts écrasés sous le poids de leur mère. "Beaucoup meurent à la naissance, parfois écrasés par leur mère immobilisée dans une cage l'empêchant de se mouvoir ou de se tourner vers ses petits", détaille L214. L'association dénonce des conditions d'hygiène infâmes : eau sale et accumulation de déjections dans des enclos crasseux. En outre, les cochons blessés ne sont pas isolés du reste du bétail comme l'exige la réglementation, mais "dévorés par leurs congénères", déplore L214.

Brigitte Gothière, cofondatrice de l'association L214, a de son côté exhorté les candidats aux municipales de 2020 à s'engager sur la cause animale, en réduisant le nombre de repas carnés issus des élevages intensifs dans les cantines scolaires et les collectivités, au profit d'une augmentation de la fréquences des repas végétariens. Sébastien Arsac, cofondateur de l'association L214 a exposé les arguments de l'association en ces termes : "Les enfants sont des consommateurs captifs, ils n'ont pas le choix de ce qu'ils mangent à la cantine. C'est donc le choix des maires que de leur servir des produits issus des élevages intensifs ou pas. La commande publique doit montrer l'exemple et contribuer à une sortie effective de ces modes de production délétères pour les animaux, les humains et l'environnement." Dans un communiqué posté sur le site de l'association en même temps que la vidéo, L214 déclare que "d'après un sondage mené les 12 et 13 novembre 2019 par l'IFOP à la demande de L214 (voir ici), 73 % des Français sont favorables à ce que la viande, les œufs, les laitages et le poisson issus de l'élevage intensif soient exclus de la commande publique (cantines scolaires, restauration collective…)."

Dans son communiqué, L214 dénonce également l'utilisation de nombreux antibiotiques, dont certains sont classés d'importance critique par l'OMS ainsi que des hormones de croissance comme le dexaméthasone, un produit dopant interdit pour les sportifs. Sur les images, tous les cochons ont la queue coupée ; alors qu'"il est pourtant interdit de pratiquer cette mutilation de manière routinière." Selon les sources de L214, en France, 95 % des cochons sont élevés dans ces conditions alors que 88 % des Français sont opposés à l'élevage intensif." L214 a prévu l'organisation d'une campagne de mobilisation le samedi 23 novembre dans 16 grandes villes de France.

Une initiative pour la défense et le respect des animaux saluée par l'émission 30 millions d'amis :

L214 : c'est quoi au juste cette association ?

L'association L214 n'en est pas à son coup d'essai. Lente agonie des porcs gazés au CO2 ou des canards à fois gras gavés, lapins jetés dans la fosse à lisier encore vivants ou chevreaux transportés dans des cages à dindes : elle s'est spécialisée dans la diffusion d'images dénonçant les mauvais traitements animaux dans les élevages et abattoir. "L214 ne produit pas des 'images choc'. C'est bien la réalité qui produit ces images terrifiantes. L214 se contente de les capturer et de les rendre publiques afin que chacun se confronte à ce qu'il refuse de voir", précisent les militants sur leur site Internet. L'association est cependant régulièrement décriée par les exploitants et syndicats d'éleveurs et d'abattoirs. Confrontez-vous, vous aussi, à ce qui se passe derrière le mur de nombreux élevages industriels et abattoirs en France, en cliquant sur l'image ci-dessous :

Fondée en 2008, l'association L214 tire son nom de l'article L214-1 du Code rural, qui a reconnu en 1976 les animaux comme des êtres sensibles pour la première fois. La méthode assumée des militants de L214 consiste à filmer en caméra cachée dans les abattoirs et les élevages industriels des scènes de maltraitance animale. Leurs images sont choquantes voire insoutenables et leur credo, radical : mettre fin à toute exploitation animale. L'association se compose d'une quarantaine de salariés, d'une dizaine de bénévoles et de centaines de militants. Elle dénonce des infractions aux règlements dans certains établissements, qui font, selon elle, subir de graves sévices aux animaux. ONG de l'environnement parmi les plus populaires de l'Hexagone, son compte Facebook affiche près de 700 000 abonnés et de nombreuses pétitions initiées par l'association sont en circulation.

De nombreuses infractions aux réglementations en vigueur sont constatées via les vidéos tournées par L214, en particulier dans les abattoirs. Ainsi, selon le code rural français et un règlement européen de 2009 (voir ici), "toutes douleur, détresse ou souffrance évitables sont épargnées aux animaux lors de la mise à mort". C'est pourquoi les abattages conventionnels sont censés mettre en place un étourdissement maximal des bêtes (à l'aide de pistolet d'abattage, de pince à électronarcose ou de CO2), voire un double étourdissement si la bête a repris conscience, pour lui éviter d'assister à sa propre mort. L'abattage rituel, comme celui pratiqué lors de l'Aïd el-Kébir par les musulmans, bénéficie quant à lui de dérogations, qu'il soit halal ou casher : les bêtes peuvent alors être égorgées en pleine conscience, mais en un seul geste. Quel que soit le type d'abattage, la loi impose un strict contrôle des pratiques d'abattage par les services vétérinaires, autrement dit en continu. Selon L214, images à l'appui, c'est loin d'être toujours le cas.

Que font les abattoirs et le gouvernement ?

Plaintes en cours d'instruction, enquêtes ouvertes, fermetures provisoires... C'est ce qui se passe pour la plupart des abattoirs pointés du doigt par L214. Nombre d'entre eux cherchent à investir pour améliorer les pratiques et le matériel, comme le décrit Le Monde dans cet article (voir ici). Certains abattoirs se portent même volontaires pour l'expérimentation de la vidéosurveillance.

En septembre 2016, une commission d'enquête parlementaire a fait des propositions pour améliorer le traitement animal dans les abattoirs français (lire ici). L'Assemblée nationale a voté l'obligation de caméras dans les abattoirs à partir du 1er janvier 2018, mais cette obligation s'est depuis transformée en expérimentation dans les abattoirs volontaires. Si la France est le premier pays européen à légiférer sur ce point, L214 regrette par ailleurs que les images des caméras vidéos soient "seulement destinées aux services vétérinaires et non aux associations ou au grand public. Or, nos enquêtes ont prouvé leurs carences répétées." N'ont finalement pas été adoptées non plus l'interdiction de broyer des poussins mâles ou l'interdiction totale des élevages de poules pondeuses en batterie à la fin du quinquennat ou encore l'interdiction des cages pour l'élevage des lapins. Les sénateurs ont en revanche "adopté l'article 13 qui permet aux associations de se porter partie civile en cas de maltraitance animale constatée. Les peines d'emprisonnement et les amendes sanctionnant les mauvais traitements envers les animaux ont été doublées. Ce délit de maltraitance animale a été étendu aux abattoirs et au transport.", précisait Public Sénat le 2 juillet 2018. Enfin, le Conseil National de l'Alimentation comporte dorénavant un "Comité national d'éthique des abattoirs", créé par la proposition de loi relative au respect de l'animal en abattoir, suite au travail de la Commission d'enquête parlementaire présidée par Olivier Falorni. Un groupe de concertation chargé de débattre quant à l'évolution de la législation et de la réglementation sur la protection animale en abattoir.