Zyed et Bouna : comment se sont déroulées les émeutes dans les banlieues en 2005

Zyed et Bouna : comment se sont déroulées les émeutes dans les banlieues en 2005 Les nuits de violences de juin 2023 ne sont pas sans rappeler les émeutes de 2005 survenues après la mort de deux adolescents dans un transformateur électrique. Cet épisode avait duré trois semaines dans les banlieues d'Île-de-France après avoir démarré à Clichy-sous-Bois.

La mort de Nahel à Nanterre a déclenché des nuits de violences importantes en France depuis la soirée du 27 juin 2023. Cette situation ravive le souvenir de la disparition de Zyed et Bouna. Les deux adolescents avaient trouvé la mort, le jeudi 27 octobre 2005, dans un local transformateur EDF à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Le drame avait été la "départ de feu" de trois semaines d'émeutes.

Zyed Benna et Bouna Traoré s'étaient cachés dans le local pour fuir un contrôle de police. Ces décès dans des circonstances douteuses avaient embrasé la ville de Clichy dès la nuit suivante, ainsi que la proche commune de Montfermeil. S'en étaient suivies trois semaines d'émeutes urbaines étendues dans toute la France ; plus de 200 policiers, gendarmes et pompiers blessés ; quatre morts parmi la population ; plus de 6 000 interpellations ; plus de 10 000 véhicules brûlés et plusieurs centaines de bâtiments endommagés.

Les chiffres de violence différents entre les situations de 2005 et 2023

Ces chiffres permettent de comparer la situation actuelle aux émeutes de 2005. La seule nuit du 29 au 30 juin 2023 a donné lieu à 875 interpellations. 492 bâtiments ont été attaqués, 2 000 véhicules incendiés et 3 880 feux sur la voie publique ont été recensés. Les violences actuelles se démarquent de celles de 2005 par la multiplication des dégradations de bâtiments publics. Par ailleurs si en 2023 les émeutes ont gagné toutes les régions françaises, en 2005 les violences étaient centralisées en région parisienne.

L'ensemble des grandes métropoles françaises ont été plus ou moins touchées par ces violences. Mais cette semaine de tensions n'atteint pas encore la teneur dramatique de 2005 et les trois décès recensés. 217 personnes avaient également été blessées dans les affrontements à l'époque. Les dispositifs policiers ne sont pas tout à fait comparables non plus : près de 11 000 policiers et gendarmes avaient été déployés au plus fort des émeutes de 2005. Pour la seule nuit du 29 au 30 juin 2023, le dispositif national était de 40 000 forces de l'ordre présentes sur le territoire.

Le rôle des réseaux sociaux change la couverture des violences

L'absence des réseaux sociaux en 2005 est aussi un élément de différenciation entre ces épisodes de violence. Les images étaient rares il y a 18 ans alors que la mort de Nahel a été filmée et diffusée directement sur les réseaux sociaux. Les plateformes comme Twitter, Snapchat ou Telegram permettent également de recenser en temps réel les points les plus chauds des émeutes ou d'organiser des rassemblements de la part des jeunes. En 2005, les réseaux sociaux étaient embryonnaires et n'avaient donc joué aucun rôle dans ces émeutes. Le phénomène de viralité n'était pas aussi rapide à l'époque ce qui explique en partie que les violences ne s'étaient pas étendues de manière aussi exponentielle.

L'état d'urgence avait été décrété en 2005

Les émeutes de 2005 étaient inédites : d'autres réactions du même type avaient eu lieu dans des quartiers populaires dans les années 80 et 90 - comme à Vaulx-en-Velin (banlieue lyonnaise) dans la nuit du 6 octobre 1991, à la suite de la mort d'un jeune homme dans un accident impliquant une voiture de police - mais sans s'étendre au-delà du quartier concerné. Or, en octobre 2005, 300 communes avaient été prises dans la tourmente. Résultat : le gouvernement Villepin avait déclaré l'état d'urgence le 8 novembre de cette année-là, sous l'autorité d'un cabinet de crise présidé par Jacques Chirac, alors à la tête de l'État. Le dispositif exceptionnel avait été prolongé trois semaines consécutives, en vertu d'une loi vieille de 50 ans adoptée pendant la guerre d'Algérie. Couvre-feux et brasiers de véhicules ou de bâtiments avaient rythmé le quotidien des banlieues aux quatre coins de la France pendant près de dix jours. Les émeutes avaient pris fin le 17 novembre 2005. Plus d'un tiers des personnes interpellées étaient mineures. Cette donnée se compare à celle 2023, car selon Gérald Darmanin "l'essentiel des personnes arrêtées" le 29 juin 2023 ont entre 14 et 18 ans.

Les familles de Zyed et Bouna avaient dû patienter dix ans pour que la justice se prononce, au printemps 2015. Les deux policiers accusés de non-assistance à personne en danger avaient finalement été relaxés. Une décision accentuant le sentiment d'injustice des proches des deux adolescents décédés. Quelques mois plus tard, le 20 octobre, le président de la République François Hollande s'était rendu à la Courneuve pour recréer du lien avec les quartiers populaires.