Construction de nouvelles prisons : combien coûte au contribuable une place de détenu ?
Gérald Darmanin veut "construire beaucoup et plus vite". Le ministre de la Justice a détaillé son plan pour accueillir les condamnés en fin de peine ou ceux emprisonnés pour de courtes durées. Aujourd'hui, les prisons sont surpeuplées : pour environ 62 000 places, il y a plus de 80 000 détenus. Si bien que les peines de moins de deux ans sont souvent aménagées, avec un bracelet ou du travail d'intérêt général. La solution du ministre : créer 3 000 places de prison en préfabriqué, a-t-il détaillé lundi 14 avril à l'issue d'une visite d'un site de production du constructeur Bouygues à Crépy-en-Valois, dans l'Oise.
Pour Gérald Darmanin, si l'on veut en finir avec la surpopulation carcérale, il faut passer "par la construction de structures légères, moins coûteuses en termes de sécurité, car nous pourrions y incarcérer les profils les moins dangereux". "On compte 15 000 détenus pour délits routiers, tout de même", rappelle-t-il. À quoi s'ajoutent 18 000 détenus pour violences conjugales et 25 600 purgeant des peines de moins d'un an, estime Le Figaro.
Une économie de 150 000 euros ?
Une méthode qui pourrait bien alléger les prisons. "Sur la seule semaine dernière, 400 nouveaux détenus sont arrivés ; 5 000 détenus dorment actuellement sur des matelas au sol et, dans certaines régions, il n'y a plus de marge de manœuvre. Le risque principal est donc de ne rien faire", a prévenu Sébastien Cauwel, directeur de l'administration pénitentiaire. Les surveillants pénitentiaires, eux, s'inquiètent : ces préfabriqués pourraient vite se dégrader, et avec eux, les conditions de travail des agents.
Mais le ministre a déjà un plan, a-t-il confié au journal : "D'ici à 2027, voire 2028, je souhaite la création, sur les domaines pénitentiaires, de quinze structures de semi-liberté - soit 1 500 places - et 10 structures dédiées aux courtes peines - également 1 500 places. Soit en tout 3 000 places, constructibles en dix-huit mois. Nous lançons dès à présent une première structure de 50 places sur le domaine pénitentiaire de Troyes-Lavau, pour une livraison à l'automne 2026." Une manière pour lui de tenter d'atteindre l'objectif du "plan 15 000", qui visait la construction de 15 000 places de prison d'ici 2027. Un chiffre qui devrait plutôt être atteint en 2029, au minimum, a prévenu l'ancien garde des Sceaux Didier Migaud.
Et le prix dans tout ça ? Car qui dit construction, dit coûts. Et qui dit plus de détenus, dit plus de surveillants. "Une place de prison coûte aujourd'hui au contribuable 350 000 euros", indique Gérald Darmanin. Avec son projet de prison "modulaire", le prix pourrait descendre à "200 000 euros en rythme de croisière". On comprend que c'est donc plus élevé au début. Et le projet dans son intégralité est évalué à 600 millions d'euros, répartis sur trois exercices budgétaires.
Le budget d'entretien des prisons en baisse
Selon un rapport de 2023 de la Cour des Comptes, un détenu (en semi-liberté ou non) coûte 105 euros par jour en moyenne au contribuable, rapporte France Culture. Dans le détail, les personnes incarcérées dans les prisons coûtent en moyenne 130 euros, mais avec des disparités selon les cas : ceux en maison d'arrêt, soit purgeant des peines courtes ou en attente de procès, coûtent 117 euros, contre 252 pour ceux en maisons centrales, très sécurisées. De l'autre côté, ceux en semi-liberté coûtent 50 euros, et les condamnés sous bracelet électronique, uniquement 10 euros par jour.
Et l'entretien des prisons dans tout ça ? Avec ses milliers de détenus, il faut pouvoir prévenir la dégradation des bâtiments. Pourtant, la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGPLP) dénonce le budget dérisoire dédié à l'"entretien lourd" pour rénover les prisons existantes. De 83 millions d'euros en 2023, il est passé à 57 millions en 2024… Et pourrait être divisé par deux en 2025.