Pétition pour Marine Le Pen : le décompte des signatures truqué ? Des doutes émergent

Pétition pour Marine Le Pen : le décompte des signatures truqué ? Des doutes émergent Si Marine Le Pen revendique 500 000 signatures à la pétition lancée en son soutien après sa condamnation à 5 ans d'inéligibilité, des doutes émergent sur ce décompte.

La pétition en soutien à Marine Le Pen est-elle vraiment nouvelle ? Lorsque la tête de file des députés du Rassemblement national a été reconnue coupable de détournements de fonds publics européens, le 31 mars dernier, le parti a mis en ligne une pétition en soutien. Sauf qu'elle détient le même URL qu'une autre pétition, lancée en novembre 2024, au moment des réquisitions du procureur. En vérifiant dans les archives du site internet, on retrouve en effet la pétition précédente. Le texte aurait-il simplement été changé sans créer de nouvelle pétition ? Si c'est bien le cas, il est possible que les signatures faites en novembre soient comptées en avril. Or, certains sympathisants du RN ayant signé la première pétition auraient pu, par exemple, décider de ne pas signer la seconde, après la condamnation de la tête de file des députés d'extrême droite. De quoi se demander si le chiffre affiché par Marine Le Pen est en réalité truqué.

L’ancienne présidente du parti d’extrême droite a été condamnée à une peine de quatre ans d’emprisonnement dont deux ans ferme, aménageable avec un bracelet électronique, à 100 000 euros d’amende, et à cinq ans d’inéligibilité, avec exécution provisoire. Une condamnation qui la prive, de fait, de présidentielle en 2027. Marine Le Pen compte bien faire appel, mais celui-ci n'est pas suspensif et la peine d'inéligibilité s'applique donc avec effet immédiat. A moins d'un jugement radicalement différent en deuxième instance et dans des délais courts (le RN espère beaucoup du procès en appel annoncé pour l'été 2026), elle est donc dans l'incapacité de concourir à l'élection suprême et n'a pas de recours pour faire annuler le caractère exécutoire ce son inéligibilité. C'est avant tout ce point précis qui indigne les soutiens de Marine Le Pen. Jeudi 3 avril, Marine Le Pen a affirmé que la pétition avait reçu un demi-million de signatures en quelques jours. Un chiffre qui pourrait donc être gonflé.

La pétition "Sauvons la démocratie, soutenons Marine" peut être trouvée en ligne. Elle est disponible sur le site même du Rassemblement national au milieu de beaucoup d'autres, pétitionner étant une habitude du RN. Les soutiens de Marine Le Pen vont ainsi afficher leurs signatures aux côtés d'autres causes, comme refuser "la censure idéologique", la taxe sur le carburant, le traité Mercosur, l'abaissement du seuil d'exemption de la TVA, mais aussi dissoudre les milices antifa, "exiger l'expulsion des OQTF", en finir avec la "submersion migratoire" ou, plus récemment, pour "exiger une politique migratoire ferme et la fin de la soumission à Alger"...

La mécanique n'est donc pas nouvelle et est même bien huilée. Cette fois, Jordan Bardella présente cette nouvelle pétition comme une marque de soutien et une action visant à dénoncer "la condamnation avec exécution provisoire de Marine Le Pen, qui l'empêche d'être candidate en 2027", n'hésitant pas à parler de "scandale démocratique". Le président du RN a aussi appelé ses soutiens à une "mobilisation populaire et pacifique" afin de montrer que "la volonté du peuple est plus forte". Un meeting de soutien a été organisé dimanche 6 avril à Paris, place Vauban, derrière les Invalides.

La pétition du Rassemblement national peut-elle changer quelque chose ?

Jordan Bardella estime que "ce n'est pas seulement Marine Le Pen qui est injustement condamnée : c'est la démocratie française qui est exécutée". Celui qui déplore la décision des juges, qui font, selon lui, preuve de "dictature" et empêchent "le peuple français de s'exprimer" appelle à signer la pétition en marque de désapprobation du verdict. Contrairement à beaucoup d'autres publiées sur le site, cette fois, c'est une décision de justice qui est visée.

Cette pétition peut-elle changer quelque chose à la décision des juges ? Non. Peut-elle permettre d'engager une procédure pour contester juridiquement l'inéligibilité de Marine Le Pen ? Non. Ce document n'aura aucun poids autre que celui de montrer qu'un nombre significatif de Français sont suffisamment indignés pour le signer. Questionnée sur l'utilité de la démarche, la députée du RN a estimé mardi soir dans les colonnes du Parisien que la pétition permettait avant tout de "donner à chacun la possibilité d’exprimer son sentiment, c’est une façon de leur dire que leur avis importe". Concrètement, Marine Le Pen n'a que deux solutions pour concourir à la présidence de la République en 2027 : que son jugement en appel aboutisse à une autre peine (ou une relaxe) ou qu'elle bénéficie d'une grâce présidentielle.

Une contre-pétition des socialistes

Quelques heures après le lancement de la pétition en faveur de Marine Le Pen, le Parti socialiste a dégainé lundi soir une autre pétition pour défendre, cette fois-ci, "la Justice et l'État de droit". "Nul n'est au-dessus des lois. Pas même Marine Le Pen qui défendait jusqu'ici l'inéligibilité à vie pour les élus qui détournent des fonds publics", a indiqué sur X le patron des socialistes.

"La pétition lancée par le RN attaque les fondements de notre démocratie et défend une justice à deux vitesses. Face à cette offensive, défendons la Justice et l'État de droit !" plaide Olivier Faure. Lundi après-midi, le Conseil supérieur de la magistrature s'était déjà lui indigné, dans un communiqué, des réactions "virulentes" après la condamnation de Marine Le Pen, les jugeant "de nature à remettre en cause gravement l'indépendance de l'autorité judiciaire, fondement de l'État de droit". Plus tard, dans la soirée, le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, a lui rappelé que "les menaces proférées contre les magistrats du Tribunal judiciaire de Paris sont inacceptables dans une démocratie", estimant le phénomène préoccupant "pour l'indépendance de l'autorité judiciaire".

Dernières mises à jour

14:37 - La pétition est-elle truquée ?

Sur les réseaux sociaux, plusieurs internautes ont remarqué une chose : l'URL de la pétition visant à soutenir Marine Le Pen après sa condamnation est le même que la pétition précédente, lancée en novembre 2024, au moment des réquisitions. En vérifiant les archives du site internet, on tombe en effet sur la pétition précédente, avec le même URL. Le texte aurait-il simplement été changé sans créer de nouvelle pétition ? Le doute est là. Ce qui remettrait en cause le décompte de signatures affiché par Marine Le Pen. Certains sympathisants du RN ayant signé la première pétition auraient pu, par exemple, décider de ne pas signer la seconde, après la condamnation de la tête de file des députés d'extrême droite. De quoi se demander si le chiffre affiché est en réalité truqué.

04/04/25 - 17:55 - En réponse à la pétition du RN, le PS lance sa propre pétition en soutien à la justice

Le PS a dénoncé une "offensive massive contre l'institution judiciaire et son indépendance" lundi 31 mars, et a décidé de lancer sa propre pétition intitulée : "défendez la démocratie, défendez la justice". "Nul n'est au-dessus des lois, encore moins ceux qui aspirent à la plus haute fonction de l'État", a écrit le Parti socialiste. Elle vient en opposition à la pétition lancée par Jordan Bardella lundi, qui a appelé à une "mobilisation populaire et pacifiste" et dénoncé "la dictature des juges". Pétition qui aurait déjà suscité l'adhésion d'un demi-million de personnes selon Marine Le Pen.

04/04/25 - 10:42 - Un demi-million de signatures revendiquées par Marine Le Pen

Alors que certains politiques comme Robert Ménard, maire divers droite de Béziers au micro d'Europe 1, ont défendu Marine Le Pen mais refusent d'aller jusqu'à signer la pétition du RN, Marine Le Pen a affirmé sur X que la pétition avait reçu un demi-million de signatures depuis lundi. Elle ajoute que 20 000 nouvelles adhésions au parti ont aussi été actées.

03/04/25 - 15:52 - Une pétition.. mais aussi un appel aux dons !

Le Rassemblement national vit un moment politique difficile. Si Marine Le Pen a été reconnue coupable en première instance, avant de faire appel, le parti à la flamme a été aussi condamné en première instance à 2 millions d’euros d’amende, dont 1 million ferme, ainsi qu’à la confiscation de 1 million d’euros saisi pendant l’instruction. 22 autres prévenus ont été condamnés en première instance à des peines allant de six mois de prison avec sursis à de la prison ferme, assorties, selon les cas, d’amendes et de peines d’inéligibilité, parfois avec sursis. Pour faire face à cette situation qui pourrait peser considérablement sur les finances - et l'avenir - du parti, le RN appelle les sympathisants à faire un don ou bien d'adhérer au parti, ce qui s'effectue en faisant un chèque.

03/04/25 - 11:26 - "Je ne signerai pas cette pétition", indique un ancien-proche de Marine Le Pen

Robert Ménard, maire de Béziers proche de l'extrême droite et ancien proche de Marine Le Pen était l'invité ce jeudi matin de CNews. "Je défends Marine Le Pen sur ce qu'on est en train de lui faire, sur le risque qu'elle ne puisse pas se représenter. Mais se présenter comme totalement innocente, comme d'est écrit dans la pétition, ce n'est pas vrai ! Ce n'est pas plus vrai que le MoDem ne l'était", a-t-il déclaré, jugeant évident que les faits de détournements de fond soient caractérisés. Le maire de Béziers considère cependant que la peine des juges est disproportionnée et que son inéligibilité pose un problème démocratique.

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