Mort de Renaud Van Ruymbeke : ces grandes affaires du juge engagé contre la corruption

Mort de Renaud Van Ruymbeke : ces grandes affaires du juge engagé contre la corruption Le juge d'instruction Renaud Van Ruymbeke est mort ce vendredi 10 mai à 71 ans. Salué par le ministre de la Justice pour son travail contre la corruption en France, il avait travaille sur plusieurs affaires historiques.

"Le juge Renaud Van Ruymbeke nous a quittés". C'est le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti qui a annoncé, ce vendredi 10 mai,  la mort du juge d'instruction connu pour être une figure de la lutte contre la corruption en France. " La France perd un grand magistrat et la Justice un immense serviteur", a poursuivi l'ancien avocat sur X (ex-Twitter) adressant ses condoléances aux proches.

Renaud Van Ruymbeke avait 71 ans et un grand nombre d'affaires à son actif, dont certaines avaient fait grand bruit. Avant de prendre sa retraire et de quitter les tribunaux en 2019, le juge avait instruit des affaires politico-financières très délicates : l'enquête sur Jérôme Cahuzac, l'affaire impliquant les époux Balkany ou encore l'enquête sur les fraudes du trader de la Société générale, Jérôme Kerviel. Du fait de sa carrière et de sa lutte acharnée contre la corruption, le juge Renaud Van Ruymbeke "incarnait l'image du juge d'instruction indépendant et courageux, et laissera une empreinte indélébile dans l'histoire judiciaire de notre pays" a déclaré le procureur général près la Cour de  cassation, Rémy Heitz, sur X après l'annonce du décès.

"Il y énormément d'argent à nos portes et personne ne fait rien" 

Renaud Van Ruymbeke avait commencé sa carrière de magistrat à la fin des années 1970 et après être sorti diplômé de l'Ecole Nationale de la Magistrature. Mais c'est en 2000 qu'il avait rejoint le tribunal de grande instance de Paris en tant que premier juge d'instruction au pôle financier. Son engagement dans la lutte anti-corruption avait toutefois commencé avant, notamment en 2016 lorsqu'il avait signé l'Appel de Genève contre la corruption.

Après sa retraite, prise en 2019, l'ancien juge di'nstruction était revenu sur certaines affaires de sa carrières dans deux livres parus en 2021 et 2022. Le premier intitulé Mémoires d'un juge trop indépendant revient sur son rôle dans les affaires Boulin, Urba, Elf, Clearstream et Kerviel. Le second, Offshore, dans les coulisses édifiantes des paradis, s'attarde plus largement sur la fraude fiscale.  Retour sur quelques affaires marquantes de Renaud Van Ruymbeke : 

► Le financement occulte du PS et l'affaire Urba

Le juge d'instruction Renaud Van Ruymbeke a mené la première perquisition au sein d'un parti politique au pouvoir en France, c'était en 1992 au siège du Parti socialiste. La procédure avait eu lieu dans le cadre de l'affaire Urba sur le financement occulte du parti politique. Une longue enquête avait mis au jour un système de financement illégal de la formation politique via l'attribution de marchés publics. Certaines entreprises, pour s'assurer l'obtention d'un marché public, versaient par un système de fausses factures des petits pourcentages du montant du marché public convoité à des entités affiliées au Parti socialiste telles qu'Urba. Ces commissions étaient ensuite, en partie, remises au PS pour financer son fonctionnement et ses campagnes. Une machinerie qui a fonctionné de 1973 à 1990.

Cette affaire avait valu au juge d'être considéré comme un opposant au PS. A noter que le juge a aussi travaillé sur une affaire liée au financement occulte du parti Les Républicains.

► L'affaire Elf

C'est une vaste affaire politico-financière sur laquelle le juge Renaud Van Ruymbeke a travaillé. La société pétrolière Elf avait réalisé plusieurs surfacturations dans diverses affaires et/ou rachat pour verser des commissions illégales à certains soutiens ou pour financer des emplois fictifs afin de rémunérer ces soutiens ou leurs proches. L'affaire avait éclaté en 1994 après une enquête de la Commission des opérations de bourse, devenue l'Autorité des marchés financiers, qui avait constaté un détournement de 504 millions de dollars entre 1989 et 1993. L'affaire impliquait des grands patrons et plusieurs personnalités politiques, notamment certaines qui étaient alors membres de l'exécutif.

► L'affaire Kerviel

Cette affaire mettait en cause les agissements de Jérôme Kerviel lorsqu'il était trader à la Société générale. En 2008, l'homme est accusé d'être responsable de la perte de 4,9 milliards d'euros. Le trader était parvenu, selon la banque, à engager frauduleusement 50 milliards d'euros sur les marchés financiers, bien plus que le total des fonds propres de la Société générale. Mais après avoir réussi à faire des bénéfices conséquents , il avait essuyé plusieurs revers et n'était pas parvenu à rattraper ses pertes. Il aurait également conduit la banque à couvrir ses agissements.

► L'affaire Cahuzac

Le juge Renaud Van Ruymbeke a aussi travaillé sur l'affaire Cahuzac dans laquelle Jérôme Cahuzac a été condamné pour fraude fiscale et blanchiment. L'homme qui était alors ministre délégué chargé du Budget dans le gouvernement de François Hollande, lorsque l'affaire a éclaté en 2012, était accusé d'avoir dissimulé des fonds financiers qu'il possédait sur un compte en Suisse et dans un autre à Singapour.

D'autres affaires figurent parmi celles traitées par le juge Renaud Van Ruymbeke : l'affaire des époux Balkany condamnés pour fraude fiscale, mais aussi l'affaire sur la fraude à la à la TVA sur les quotas de carbone. Et bien d'autres encores.