L'un des "tortionnaires" de Bétharram a pu poursuivre sa carrière, jusqu'à devenir directeur adjoint d'un collège
Dans l'affaire Bétharram, un homme est visé par au moins 74 plaintes pour viols, agressions sexuelles et violences sur mineur. Damien S. dit "Cheval", est un ancien surveillant de dortoir de Notre-Dame de Bétharram dans le Béarn. Il avait été interpellé et placé en garde à vue le 19 février dernier, avant d'être relâché en raison de la prescription des faits. Dans le même temps, plusieurs témoignages accablants le visent.
Dans les colonnes de France Info, un ancien élève, Eric, décrit celui qui est alors recruté à 23 ans comme surveillant en 1978 : "un véritable tortionnaire, un sadique, cruel, vicieux, pervers, un barbare déguisé en jeune homme de bonne famille, avec sa veste Yves Saint-Laurent et ses petites lunettes cerclées de métal doré", peut-on lire. "Cheval" avait notamment une "spécialité", confie-t-il : celle "du perron". "Je me retrouve debout en pyjama, dehors, au perron pendant trois heures environ, après avoir chuchoté dans le dortoir. 'Cheval' arrive vers une heure du matin, il me fait mettre à genoux […] m'ordonnant de pencher la tête en avant. Les yeux en coin, je vois son pantalon tendu au niveau de son sexe. […] Il m'ordonne de demander pardon. Ce que je fais. Il retourne sa chevalière de l'autre côté afin que cela fasse bien mal lors de la frappe. Il m'envoie immédiatement une seule et très forte baffe. On peut plutôt appeler cela une beigne". À l'époque, l'élève a 12 ans. Et ce témoignage est loin d'être le seul concernant "Cheval".
Un autre ex-élève de l'établissement privé l'assure : "Il (Cheval) a été mon violeur durant mes quatre années, de 1983 à 1988". Un troisième témoigne lui dans les colonnes de Sud Ouest : "Il me prenait sur ses genoux, m'embrassait de force sur la bouche et me faisait une fellation", confie-t-il. Pour rappel, Damien S. a été licencié de Bétharram en 1989. D'après les informations de France Info, il a reconnu lors de sa garde à vue les violences physiques, mais a contesté les accusations d'agressions sexuelles et de viols.
"Il est fort ce monsieur, il n'est jamais inquiété"
Après Notre-Dame de Bétharram, "Cheval" est passé par l'institution catholique Saint-Dominique de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), entre 1989 et 1997 comme censeur, précise dans un courrier (que France Info a pu consulter) l'enseignement catholique des Hauts-de-Seine. D'après l'enseignement catholique, son départ du Béarn est dû à des raisons familiales. "Sans enquête et sans rien, il quitte Bétharram pour affaires de mœurs et il est pris", fustige Alain Esquerre, le porte-parole des victimes de Bétharram. "Il est fort ce monsieur, il rebondit sans aucun problème, il n'est jamais inquiété ce monsieur", poursuit-il. L'enseignement catholique assure n'avoir "à ce jour connaissance d'aucune plainte concernant ses années de présence à Saint-Dominique". En fin de carrière, "Cheval" a rejoint successivement le lycée Saint-Paul Bourdon Blanc, à Orléans, puis le collège Léon-XIII, à Châteauroux. Les postes de conseiller d'éducation et de directeur adjoint lui sont successivement confiés.
À partir de ce lundi 17 mars, l'établissement Notre-Dame-de-Bétharram est contrôlé par le rectorat de Bordeaux. "Il est important qu'on puisse mesurer le climat de l'établissement et qu'on puisse s'assurer que les faits dramatiques rapportés par d'anciens élèves ne peuvent plus se produire aujourd'hui", a expliqué ce lundi, la ministre de l'Education nationale, Elisabeth Borne au micro de France Info. "Huit personnels de l'Education nationale" seront sur place "pendant quatre jours", a-t-elle fait savoir. L'ex-Première ministre a assuré qu'elle prendrait "les mesures qui s'imposent" en fonction des conclusions de l'inspection dans l'établissement béarnais. Désormais, de manière générale et pour densifier le processus de contrôle, "60 inspecteurs supplémentaires" et "40 % des établissements privés sous contrat seront inspectés dans les deux prochaines années", a-t-elle indiqué.