Mort de Mohamed B. à Marseille : les trois policiers mis en examen, le contexte de pillage se clarifie
[Mis à jour le 10 août 2023 à 18h03] Plus d'un mois après la mort de Mohamed Bendriss, survenue en marge des émeutes dans la nuit du 1er au 2 juillet 2023 à Marseille, trois policiers du Raid ont été mis en examen pour "violences avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner", ce jeudi 10 août. Ils ont également été placés sous contrôle judiciaire à l'issue de leur garde à vue, levée dans la matinée. Mardi 8 août, cinq membres de l'unité d'élite avaient initialement été placés en garde à vue. Une garde à vue finalement levée pour deux d'entre eux dans la soirée, avait fait savoir le parquet.
Selon La Provence, le parquet a également précisé jeudi que certains éléments tendent à démontrer que Mohamed B. pourrait faire partie des pilleurs. Ce qui est l'un des points que s'attachent à éclaircir les enquêteurs chargés du dossier depuis le début de l'affaire. Les images de vidéosurveillance semblent notamment montrer que Mohamed B., alors à scooter au moment du drame, aurait tenté de prendre le sac porté par un second individu et qui contenait des marchandises volées lors du pillage du magasin Foot Locker. Pillage dont la colonne du Raid en question avait été informée justement. "Il existe donc des éléments démontrant que ces deux individus participaient à une action d'appropriation frauduleuse dans un contexte de pillage généralisé des magasins du centre-ville fondant une action d'intervention pour en interpeller les auteurs", estime le parquet dans son communiqué.
Une vidéo qui prouve son innocence ?
La veuve de Mohamed Bendriss a assuré, au micro de RTL, avoir "la vidéo qui prouve que [son] mari n'a rien fait". Mais les images que BFMTV s'est procurée auprès de la famille ne montrent pas de tir policier à l'encontre du défunt. Sur la vidéo prise par le téléphone portable de la victime, des policiers sont filmés "en train de maîtriser un individu au sol, sur un trottoir" au niveau de la rue Saint-Ferréol, selon la chaîne d'information en continu. Une autre vidéo de la soirée montre, elle, un homme identifié comme Mohamed B. s'écrouler après avoir coupé le moteur de son scooter, sur le cours Lieutaud.
Si les images n'en disent pas plus sur le déroulé des faits, l'épouse de la victime a plusieurs fois mis en doute l'inexistence d'autres vidéos : "Ce qui m'intrigue est que l'on me dit qu'il n'apparaît pas sur les caméras de surveillance alors qu'à 00h49, il était devant le Foot Locker de la rue Saint-Ferréol où il filmait." Selon elle, "c'est [un] policier qui a tiré. Il l'a vu en train de le filmer, il a tiré avec un flash-ball." Le parquet de Marseille a ouvert une information judiciaire pour "coups mortels avec usage ou menace d'une arme". La police judiciaire et l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) ont été co-saisies de l'enquête.
L'homme décédé faisait-il partie des émeutiers ?
Ce drame est intervenu un soir d'émeutes à Marseille, lesquelles ont eu lieu en réaction à la mort du jeune Nahel à Nanterre. Des scènes d'exactions et de pillages se sont produites dans la préfecture des Bouches-du-Rhône, entrainant le déploiement d'un important dispositif de police. Mohamed faisait-il partie de ces casseurs ? Niet, affirme son épouse. "Mon mari n'a rien fait de mal. Depuis qu'il a eu un enfant, il a tout arrêté. Il n'est pas de ce genre qui casse. Il ne faisait rien, il regardait les gens, prenait des photos. C'est tout ce qu'il faisait", a-t-elle déclaré sur RTL. "Non, rien à voir, il a un enfant et sa femme est enceinte ! C'est des trucs de gamins, pas des trucs de grands", abonde un ami auprès de franceinfo.
Un avis que ne semble toutefois pas partager le parquet, comme l'a relayé La Provence. Jeudi 10 août, le parquet a ainsi indiqué dans un communiqué qu'il existe des "éléments" démontrant que Mohamed B. participait à "une action d'appropriation frauduleuse dans un contexte de pillage généralisé des magasins du centre-ville fondant une action d'intervention pour en interpeller les auteurs".
Quel a été le parcours de Mohamed Bendriss ce soir-là ?
Selon le récit fait par ses proches, Mohamed B. a passé une partie de la soirée dans un salon de thé sur la Canebière, où il avait ses habitudes. "On était ensemble jusqu'à 23h30, minuit", a expliqué le meilleur ami de la victime à franceinfo. Ensuite, Mohamed B. a pris son scooter en direction de chez sa mère, sur le cours Lieutaud, à environ 1 km de là. Pourtant, ce n'est qu'à 00h45 qu'un élément indique qu'il était toujours en vie : à ce moment-là, il filme une interpellation en cours rue Saint-Ferréol. Qu'a-t-il fait entre temps ? Mystère. Après avoir diffusé la vidéo sur Snapchat, il remonte à scooter puis s'écroule devant l'immeuble de sa mère. A-t-il reçu un tir de LBD entre temps ? C'est la question, à laquelle les conclusions du médecin légiste semble répondre que oui, du fait du décès dans un "temps court" après l'impact. Tout cela s'est produit dans un secteur touché par des émeutes cette nuit-là.