Attaque à Annecy : l'assaillant en détention, mobile inconnu... Où en est l'enquête ?
Il n'a toujours pas expliqué son geste. L'auteur de l'attaque au couteau perpétrée à Annecy est resté silencieux depuis son interpellation, le jeudi 8 juin. Ni sa garde à vue qui a duré deux jours, ni sa mise en examen pour "tentatives d'assassinat" et "rébellion avec arme" décidée le 10 juin n'y ont changé quelque chose. Abdalmasih H., qui a blessé six personnes dont quatre enfants, a été placé en détention provisoire à la prison d'Aiton, en Haute-Savoie, et son incarcération en cellule anti-suicide fait l'objet d'une étroite surveillance. Depuis son interpellation, l'auteur de l'attaque se montre agité et son comportement soulève des questions quant à sa santé mentale.
Tandis que l'assaillant était placé en détention provisoire, la procureure de la République d'Annecy donnait des nouvelles rassurantes des victimes de l'attaque d'Annecy, le samedi 10 juin : "Plus aucun n'a son pronostic vital engagé." Les quatre enfants restent hospitalisés dans les centres hospitaliers de Grenoble et de Genève, tout comme la cinquième victime gravement blessée, un homme de 70 ans.
Les victimes d'Annecy désormais hors de danger, l'enquête va retenir toute l'attention. Les motivations de l'auteur de l'attaque ne sont toujours pas connues, mais sa situation administrative et, peut-être, des troubles psychiatriques pourraient avoir favorisé le passage à l'acte.
Que sait-on de l'attaque au couteau perpétrée à Annecy ?
L'attaque au couteau a éclaté vers 9h40 le jeudi 8 juin dans le parc du Pâquier qui longe le lac d'Annecy, en Haute-Savoie. L'auteur de l'attaque, Abdalmasih H. a pénétré une aire des jeux armé d'un couteau pliable et s'en est pris à cinq personnes, dont quatre enfants âgés de 2 à 3 ans. Pris en chasse par des civils, notamment un étudiant de 24 ans surnommé sur les réseaux sociaux "le héros au sac à dos", l'assaillant a quitté l'aire de jeux et pris la fuite sur quelques centaines de mètres. Dans sa course, il a attaqué une sixième personne avant d'être mis hors d'état de nuire par les tirs des forces de l'ordre. Des tirs qui ont également touché la sixième victime. L'auteur de l'attaque, un réfugié syrien de 31 ans, a été interpellé à 9h45 seulement quelques minutes après l'assaut.
Quel est l'état de santé des enfants et des victimes ?
Six personnes ont été blessées lors de l'attaque au couteau à Annecy : quatre mineurs et deux adultes. Les enfants pris pour cible sont âgés de 22 mois à 3 ans, le plus jeune est un touriste Néerlandais prénommé Peter. Il a été transféré à l'hôpital de Genève. Deux enfants sont cousins et s'appellent Ennio et Alba, enfin la dernière enfant et de nationalité britannique. Tous les trois ont été pris en charge au centre hospitalier de Grenoble. Si deux enfants se trouvaient en urgence absolue après l'attaque, désormais "plus aucun n'a son pronostic vital engagé" selon la procureure de la République.
Quant aux deux adultes blessés, l'un d'eux âgé de 78 ans et légèrement blessé a été pris en charge sur place et n'a pas nécessité d'hospitalisation. En revanche, un homme de 70 ans a été gravement blessé d'abord par arme blanche sous le coup de l'assaillant puis a été touché, par erreur, par les tirs des policiers qui visaient l'auteur de l'attaque. L'individu a été opéré à l'hôpital d'Annecy et est désormais hors de danger.
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Qui est Abdalmasih, l'auteur de l'attaque d'Annecy ?
Le profil de l'auteur de l'attaque au couteau à Annecy s'est précisé dans les heures qui ont suivi le drame. Abdalmasih H. est un réfugié syrien de 31 ans. Après avoir fait son service militaire obligatoire, l'homme a fui son pays en 2011 à cause de la guerre civile. Selon les autorités françaises, le trentenaire avait obtenu le statut de réfugié en Suède le 26 avril 2013 et voyageait donc en situation régulière au sein de l'Europe. C'est seul qu'il est arrivé en France en octobre 2022, selon la procureure de la République d'Annecy, soit un mois avant la formulation d'une demande d'asile auprès de l'Ofpra le 28 novembre 2022. Abdalmasih a reçu la notification du rejet de sa demande par voie électronique le 4 juin 2023, seulement quatre jours avant l'attaque à Annecy.
Cette situation administrative pourrait être un mobile potentiel de l'attaque au couteau, c'est du moins l'hypothèse émise pour le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin sur le plateau de TF1, le 8 juin. L'auteur de l'attaque venait effectivement de se voir refuser le statut de réfugier en France – il le possédait déjà auprès des autorités suédoises – après avoir essuyé plusieurs échecs pour l'obtention de la nationalité suédoise, nationalité accordée à sa femme et son enfant. Ses refus à répétition n'auraient pas été sans conséquence sur la santé de l'assaillant. Selon sa mère, Abdalmasih H. souffre d'une "grave dépression" : "Ma belle-fille disait qu'il n'était jamais bien, toujours déprimé, avec des idées noires, il ne voulait pas quitter la maison, il ne voulait pas travailler. […] Ça l'a probablement rendu fou", a-t-elle indiqué auprès de l'AFP.
La question de la santé mentale de l'auteur de l'attaque à Annecy se pose. L'homme qui était SDF depuis plusieurs mois dans la préfecture de Haute-Savoie présentait un comportement étrange ces derniers jours à en croire les témoignages de locaux auprès des médias. Un comportement qui a également été observé lors de la garde à vue et lors de sa détention au commissariat d'Annecy. "Il criait en anglais, il pleurait, il se roulait par terre " a raconté un codétenu auprès de BFMTV. Et depuis son incarcération le suspect a refusé de s'alimenter et n'a pas bougé de son lit, où il est resté prostré "en position fœtale" sans "dire un mot", selon franceinfo.
L'auteur de l'attaque à Annecy a-t-il des troubles psychiatriques ?
"Aucun antécédent judiciaire" n'a été identifié chez l'auteur de l'attaque à Annecy affirmait la Première ministre Elisabeth Borne, le 8 juin. La procureure de la République s'est montrée moins catégorique sur ce point indiquant le samedi 11 juin qu'il était "prématuré" de statuer sur la présence ou l'absence de troubles. Le suspect a été soumis à une expertise psychiatrique le vendredi 9 juin et les spécialistes ont estimé l'état de l'assaillant compatible avec le régime de la garde à vue. Le comportement de l'individu en garde à vue ou en détention est-il le signe de troubles psychiatriques ? Ou d'une tentative d' "obstruction" ? L'enquête doit éclaircir ce point.
L'attaque au couteau à Annecy est-elle un attentat ?
L'attaque au couteau à Annecy a-t-elle été motivée par une allégeance à un groupe terroriste ? La question s'est posée dans les heures suivants le drame, mais la procureure de la République a indiqué dès le jeudi 8 juin qu' "aucune motivation terroriste n'apparait à ce stade" de l'enquête. Le parquet national antiterroriste n'a pas été saisi de l'affaire.
Si plusieurs éléments ont été interprétés, notamment par des politiques, comme des signes du potentiel caractère terroriste de l'attaque : le port d'un turban qui s'est avéré être un t-shirt, ou la nationalité syrienne de l'individu. Mais plusieurs jours après l'attaque, le drame n'a toujours pas été revendiqué.
Concernant les éventuels mobiles, le parquet estime également qu'il est " prématuré " d'avancer des pistes. Celles d'un acte commis en raison de la situation administrative de l'assaillant et celle d'un acte motivé par des croyances ou des troubles de l'auteur de l'attaque sont tout de même envisagées. Lors de l'attaque, l'homme a plusieurs fois dit " agir au nom de Jésus Christ ". Des mots apparemment répétés pendant la garde à vue selon franceinfo. L'homme qui se présente comme un chrétien de Syrie portait une croix chrétienne et détenait des photos d'icônes chrétiennes lors de son interpellation.