Crash dans les Alpes (Digne) : la trajectoire intrigue, l'avion n'a pas donné d'alerte
[Mis à jour le 24 mars 2015 à 20h05] Que s'est-il passé au-dessus des Alpes-de-Haute-Provence ce mardi matin ? La question reste ouverte alors que le bilan officiel fait déjà état de 150 morts, la totalité des passagers, et que la zone de l'accident rend l'intervention des secours et des enquêteurs très difficile. L'accident d'un avion à Barcelonnette, ou plus exactement à Vernet, une commune située à proximité de Barcelonnette, dans les Alpes-de-Haute-Provence, signe en tout cas l'un des plus lourds bilans pour une catastrophe aérienne en France. L'avion, qui survolait les Alpes au moment du crash, avait décollé de Barcelone ce matin et devait rejoindre Düsseldorf, en Allemagne. Selon les dernières informations, l'avion serait totalement détruit. Les premières photos du crash ont été publiées sur Twitter. Le plus gros débris ne dépasserait pas un mètre de taille.
La boîte noire a été retrouvée en fin d'après-midi avant d'être confiée au BEA (Bureau d'enquêtes et d'analyses). Elle fera l'objet d'une "exploitation immédiate", "dans les heures qui viennent" selon Bernard Cazeneuve, le ministre de l'Intérieur. Le BEA a par ailleurs ouvert une enquête comme il l'a indiqué dans un communiqué. C'est cet organisme qui est en charge des investigations techniques en cas de catastrophe aérienne. Les premiers éléments ne permettent pas pour l'instant de déterminer avec précision les causes du crash.
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Une chute de 8 minutes
Dans une déclaration en milieu d'après-midi, le patron de GermanWings a indiqué que l'avion a décollé à 10h01 de Barcelone. Il a atteint 38 000 pieds à 10h35, mais a "décroché" et a commencé à perdre de l’altitude. Cela a duré 8 minutes. Le contact de l’avion avec les radars français a été perdue. Selon les experts, le mot "décrochage" n'est pas approprié, compte tenu de la durée et de la linéarité de la descente, bien qu'il ait été utilisé par le PDG de GermanWings. Les experts de la compagnie seront envoyés sur place. Airbus a indiqué également dans l'après-midi que ses experts se rendront également sur les lieux du crash, comme le veut la procédure. La compagnie GermanWings est une compagnie lowcost de Lufthansa.
Une perte radio à 10h30
Selon le Monde, "une perte radio avec l'avion" a été signalée vers 10h30. Un appareil en vol doit en effet se connecter régulièrement avec les contrôleurs aériens. Malgré de "multiples appels, l'avion n'a pas répondu. L'ingénieur chargé du suivi de l'appareil a par ailleurs constaté que ce dernier ne suivait pas sa trajectoire et perdait de l'altitude. Il a alors décidé de déclancher une détresse, selon des informations de la Direction générale de l'aviation civile. Un avion de chasse a été dépêché ainsi qu'un hélicoptère de la gendarmerie. Selon les premiers éléments, l'avion serait monté à 11 000 mètres (38 000 pieds) d'altitude avant de chuter. En moins de 10 minutes, il avait perdu plus de 30 000 pieds. C'est à ce moment-là que le crash aurait eu lieu. A aucun moment pourtant, l'alerte n'a été donnée depuis le cokpit de l'appareil.
Une dépressurisation en cause ?
Jean-Paul Bloin, lieutenant-colonel de gendarmerie de la Seyne-les-Alpes, où les secours sont basés, indique que l'accident a eu lieu "dans une zone d'un hectare environ, très ascendante, à flanc de pente". Les nombreux débris éparillés laissent à penser que l'avion s'est désagrégé en touchant le sol. La piste de la dépressurisation est envisagée par plusieurs spécialistes. Métronews reprend cette hypothèse qui voudrait qu'une fuite importante à l'intérieur de l'avion ait eu lieu (fente dans un hublot ? trou dans la carlingue ?) , obligeant les pilotes à rapidement baisser en altitude pour que l'air devienne respirable. Le journal gratuit indique sur son site Internet que la procédure à suivre en cas de dépressurisation est bien connue des pilotes, qui s'exercent chaque année à ce type de manoeuvre. Quand il atteint les 3 à 400 mètres d'altitude, l'appareil peut alors tenter de gagner un aéroport pour un atterrissage d'urgence.
Les Alpes, une trajectoire étrange
L'avion, un Airbus A320, appareil phare de la marque européenne, est tombé sur la commune de Méolans-Revel, près de Vernet, dans les Alpes-de-Haute-Provence, à la hauteur du massif "des Trois Evêchés", entre 2000 et 3000 m d'altitude. L'appareil survolait donc la région de Barcelonnette, qui n'est pas exactement dans la ligne entre Barcelone et Düsseldorf, ce qui a immédiatement suscité des spéculations sur le Web. Ce dernier s'est éloigné sensiblement de la trajectoire optimale, vers l'est, pour se retrouver au dessus des Alpes. L'A320 de la GermanWings serait donc manifestement sorti de son itinéraire. Le site FlightRadar.com, qui compile les données de vol de milliers d'appareils, a en effet retracé le trajet extact de l'avion. Rappelons tout de même que les appareils ne suivent pas une ligne droite entre deux points, mais doivent parfois emprunter d'autres trajectoires, selon les conditions de vol et les couloirs aériens.
La trajectoire suivie par l'avion #A320 de #GermanWings pic.twitter.com/N3oFuFrllp
— Olivier Clairouin (@OClairouin) 24 Mars 2015
Dans les Alpes, des conditions de vol idéales
On évoque également l'hypothèse d'une procédure d'atterrissage d'urgence, mais cette information est à confirmer. L'avion a en effet suivi une descente longue, sans véritable "décrochage". Il semblerait qu'un ennui ait forcé les pilotes à tenter de "planer" avant que l'avion ne finissent par chuter.

Sur le lieu du crash, les conditions météo étaient idéales. Aucun nuage et aucune rafale de vent n'ont pu perturber le vol de l'appareil. Selon un témoin, l'avion n'a pas explosé en vol mais est descendu à grande vitesse avant de s'abîmer au sol. Peu avant le crash, un autre témoin travaillant dans une dans une scierie à Prads a aperçu l'appareil et s'est rendu compte de ses difficultés. Le témoin, cité par La Provence, évoque une vision de "quelques secondes" et indique que l'appareil volait "très bas" et "avait l'air de baisser". Il indique en revanche ne pas avoir entendu de bruit particulier. D'après les propos rapportés par un autre témoin dans La Provence, "l'avion a tapé la falaise".
Un avion vérifié en 2013
L'A-320-211 datait de 1990, un âge qui provoque des réactions outre-Rhin, où l'entretien de l'appareil est objet de suspicions. Le Parisien rapporte que cet Airbus était "en fin de vie pour les vols commerciaux", ce type d'engin naviguant généralement pendant 25 ans. Baptisé "Mannheim" et immatriculé D-AIPX, il a effectué son premier vol le 29 novembre 1990 et son premier vol commercial, le 6 février 1991. L’avion et a volé pour Lufthansa pendant plusieurs années avant d'entrer dans le giron de GermanWings. Le dernier checkup de routine a eu lieu en mars, à Dusseldorf, et a été réalisé par les équipes techniques de la compagnie. Le dernier checkup complet a eu lieu à l’été 2013, conformément aux procédures Airbus. Le capitaine de l’avion avait plus de 10 ans d’expérience et 6000 heures de vol chez les deux compagnies, selon le patron de GermanWings. Lors de la conférence de presse, un journaliste a interrogé un technicien de la compagnie sur un "ordinateur défaillant" qui avait été relevé dans l'appareil. Ce dernier aurait été remplacé selon la réponse du responsable technique de GermanWings.
L'A320 est l'un des appareils les plus surs du monde selon un expert interrogé sur BFMTV. L'avion de ligne est le deuxième appareil le plus vendu au monde depuis sa mise en service en avril 1988. Il s 'agit d'un moyen-courrier de 37,5 m de long, de plus de 40 tonnes à vide et qui dispose d'unne capacité de 174 passagers. L'A320 a déjà marqué l'histoire pour un accident tragique, celui du Mont-Saint-Odile, en janvier 1992.