Ce miel "français" vient en réalité de Chine - comment savoir si vous en avez dans vos placards
De plus en plus de produits alimentaires utilisent l'étiquette "Fabriqué en France" ou "Made in France", affichant la cocarde tricolore sur leur emballage. Mais attention aux fraudes et aux tromperies ! Les services des douanes et la DGCCRF, qui protègent les consommateurs contre les arnaques et vérifient l'origine des produits, détectent chaque année des pratiques commerciales trompeuses. Et parfois massives.
Une affaire vient d'illustrer une de ces pratiques, comme l'a rappelé la DGCCRF il y a quelques jours au sujet d'une décision de justice remontant à l'été. Une société, ainsi que son dirigeant, ont été condamnés par le tribunal judiciaire de Perpignan le 5 juillet 2023 à une amende de 50 000 euros et six mois de prison avec sursis. Les chefs d'accusation ? Pratique commerciale trompeuse et tromperie sur l'origine du miel.
L'entreprise a en effet écoulé pas moins de 140 000 kg de miel espagnol, roumain et chinois comme du "Miel du Roussillon" et ce pendant près de trois ans, entre 2015 et 2018. Et l'arnaque aurait continué si un client de Haute-Loire n'avait pas décidé de soumettre le miel qu'il avait acheté à une analyse pollinique dans un laboratoire privé. Les résultats ont montré que ce miel n'était pas d'origine française, une conclusion ultérieurement confirmée par les laboratoires du ministère de l'Économie.
Cette première découverte a fini par lever le voile sur une fraude à grande échelle. Les colis de miel étaient reçus en France puis renvoyés au nom de "Miel du Roussillon" à des revendeurs partout dans l'Hexagone. Les enquêteurs ont notamment découvert un site, dans l'Aude, où plus de 2 tonnes de miel conditionné en fûts étaient entreposées. Sur ces fûts, des étiquettes indiquant une origine espagnole étaient apposées, tandis que d'autres étiquettes mentionnaient fièrement "Miel du Roussillon" et "Origine France," avec le matériel nécessaire à leur collage à proximité.
Du miel douteux partout, comment vérifier ?
C'est bien connu, le miel ne se périme pas. Compte tenu des quantités de miel écoulé, soyez méfiant si un pot affichant "Miel du Roussillon" un peu ancien se trouve encore dans vos placards. Plus généralement, quand vous achetez du miel, il y a des indicateurs qui doivent vous mettre la puce à l'oreille : une origine affichée sans mention du nom et de l'adresse de l'apiculteur doit vous alerter. La formule "Mis en pot" est d'ailleurs à regarder de près. Si elle est suivie par une région ("Mis en pot dans les Pyrénées" par exemple), cela peut sous-entendre que le miel n'a pas été produit à cet endroit. Préférer la mention "Mis en pot par l'apiculteur", associée encore une fois à ses coordonnées.
L'affichage de l'origine du miel est pour sa part obligatoire. S'il s'agit d'un mélange, il est possible de voir figurer "Mélange de miels originaires de l'UE", "Mélange de miels non originaires de l'UE", ou "Mélange de miels originaires et non originaires de l'UE". Mais encore une fois méfiance : l'origine européenne du miel n'est pas une garantie. L'Espagne est par exemple connue pour avoir importé des dizaines de tonnes de miel en provenance de Chine ces dernières années, dont une grande partie a été ensuite mélangée et réexpédiée en Europe, notamment en France, comme l'indique FranceAgriMer dans plusieurs rapports.
Préférez donc les miels portant l'étiquette Indication géographique protégée (IGP) ou un label reconnu (label Rouge miel de Provence, AOP sapin des Vosges etc.). Privilégiez aussi les miels purs (thym, lavande, acacia, châtaignier…) aux mélanges qui rendent de fait la traçabilité plus difficile. Pensez enfin à comparer l'appellation florale avec la zone géographique mentionnée et souvenez-vous que la lavande pousse plus facilement en Provence qu'en Bretagne.
La France ne produit qu'un quart du miel qu'elle consomme, notamment à cause de capacités de production limitées et du prix élevé du miel local. Ce qui ouvre grand la porte aux importations. Le tout sans compter les "apiculteurs- conditionneurs", des apiculteurs qui produisent peu mais mélangent beaucoup leur miel avec celui qu'ils achètent à l'étranger... Or dans certains pays comme la Chine, les producteurs sont suspectés d'utiliser du glucose pour nourrir leurs abeilles voire de "couper" directement le miel avec du sirop de sucre. Des mélanges toujours plus élaborés et plus difficiles à détecter par les experts.