"De partout" : mais d'où vient cette expression qu'on voit partout (et est-elle correcte) ?

"De partout" : mais d'où vient cette expression qu'on voit partout (et est-elle correcte) ? Vous l'avez sûrement déjà entendu, voire prononcé sans y penser. Mais l'expression "de partout" est-elle réellement correcte ? Et d'où vient-elle exactement ?

Selon le Foreign Service Institute (FSI) des États-Unis, il faut compter entre 600 et 750 heures d'apprentissage pour qu'un anglophone de langue maternelle atteigne un niveau de base en français, rapporte la BBC. Une durée relativement courte par rapport à d'autres langues plus complexes, mais qui rappelle que la maîtrise d'une langue repose sur de nombreuses subtilités. 

Et pour les francophones natifs, ces subtilités peuvent durer toute une vie. Car parler français couramment ne garantit pas toujours d'éviter les pièges du registre, des tournures régionales, des expressions familières mal employées ou des nouvelles expressions qui déferlent chaque année dans les cours d'école. La preuve avec cette petite locution qui se glisse de plus en plus souvent dans le langage : "de partout". Utilisée à l'oral ou à l'écrit, sur les réseaux, dans la rue, et même vue dans la presse dernièrement, elle s'entend partout. Ou devrait-on dire... de partout !

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L'expression ne date pas d'hier, bien que sa date d'apparition reste incertaine. D'après le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL), on la retrouve dès 1837 dans le livre Mémoranda 1, compilation des journaux écrits par Jules Barbey d'Aurevilly : "J'étais plus mince sans corset qu'elle avec le sien qui craquait de partout" (p.155). Le CNRTL classe ce terme comme une expression populaire signifiant "de tous les côtés à la fois".

"De partout" évoque donc une provenance multiple, une sorte de dispersion géographique. Le Portail linguistique du Canada confirme cet usage, indiquant que "de partout" est tout à fait correct pour décrire quelque chose qui émane de plusieurs endroits : "Un toit qui coule de partout", "Les pèlerins affluaient, venant de partout", ou encore "Il souffre de partout : des épaules, des jambes, du dos".

Mais cette locution est souvent utilisée à mauvais escient, notamment lorsqu'elle remplace l'adverbe "partout" utilisé seul. Dire "il est connu de partout" est incorrect : on dira simplement "il est connu partout". Le "de" n'apporte aucune spécificité et alourdit inutilement la phrase. Pourtant, l'erreur est fréquente, y compris dans les médias. Un article d'Actu Marseille titrait : "Des forces de l'ordre déployées de partout". Une formulation plus juste aurait été : "déployées de toutes parts", ou simplement "partout", selon l'intention. 

Ce glissement illustre à quel point certains usages familiers s'installent, même dans des contextes professionnels. Or, le choix des mots peut peser : certains recruteurs associent ces tournures à un manque de rigueur linguistique. D'où l'intérêt d'adapter son langage au contexte. Cette confusion rappelle aussi l'existence de la locution "tout partout", très régionale et encore utilisée dans plusieurs départements du nord et de l'est de la France, selon le Dictionnaire des régionalismes de France. Très familière, elle reste pourtant bien vivante.